La bonne performance du Japon aux JO de Londres doit porter ses fruits

Société Culture

Les Jeux olympiques de Londres se sont achevés le 12 août. Les athlètes japonais ont remporté un nombre record de médailles — 38 dans 13 disciplines différentes. Le journaliste sportif Ninomiya Seijun analyse ici les résultats de ces Jeux et l’impact qu’ils auront sur la candidature de Tokyo pour accueillir les Jeux de 2020.

Un record

La charte olympique définit clairement les Jeux comme une compétition, non pas entre pays, mais entre athlètes s’affrontant dans des épreuves individuelles ou en équipe. Et pourtant le Japon n’est pas le seul pays à osciller entre la joie et la tristesse selon l’évolution du décompte des médailles au fur et à mesure de l’avancement des Jeux.

La Grande Bretagne, pays hôte (*1) pour les jeux de 2012, a remporté 29 médailles d’or. Ce score, qui l’a placée en troisième position derrière les États-Unis et la Chine, marquait une rupture avec le schéma habituel, selon lequel les États-Unis, la Chine et la Russie se réservent les trois premières places. La Grande Bretagne enregistrait ainsi sa meilleure performance depuis les Jeux olympiques de Londres de 1908.

Avant les Jeux, le Comité olympique japonais (COJ) avait fixé comme objectif à ses athlètes d’arriver au moins en cinquième place au classement par médailles d’or. L’objectif n’a pas été atteint, mais le Japon a tout de même obtenu 7 médailles d’or, 14 d’argent et 17 de bronze, soit un total de 38. C’était un nouveau record, avec un point de plus que le précédent — les 37 médailles remportées en 2004 aux Jeux olympiques d’Athènes.

Un exploit, à n’en pas douter ! Mais il n’en reste pas moins que le Japon a été devancé par ces deux grands rivaux régionaux, la Chine (38 médailles d’or, 27 d’argent et 23 de bronze), mais aussi la Corée du Sud (13 médailles d’or, 8 d’argent et 7 de bronze). Certains politiciens ont fait la fine bouche, sous prétexte qu’il n’y a peut-être aucune honte à se faire battre par un pays comme la Chine, avec ses 1,3 milliard d’habitants, mais qu’il est inacceptable de se retrouver derrière la Corée du Sud, dont la population est légèrement supérieure à 50 millions d’habitants.

Au tableau des médailles, l’or a la priorité. Dans l’absolu, un pays qui n’aurait obtenu qu’une médaille d’argent finirait mieux placé au classement qu’un pays qui aurait remporté 100 médailles de bronze, et une seule médaille d’or lui permettrait de « battre » 100 médailles d’argent. C’est grâce à cette méthode de calcul que la Corée du Sud est arrivée à la cinquième place et le Japon à la onzième. Les médailles d’or se voient en vérité attribuer beaucoup de valeur.

Mais ce serait une erreur de se fonder sur ce calcul pour déclarer que le Japon a « perdu » face à la Corée du Sud. Les athlètes japonais ont récolté des médailles dans 13 disciplines différentes. Cet exploit atteste de la richesse des talents que recèle le sport japonais.

Jeux olympiques de Londres 2012 — Tableau des médailles

Rang de l’or Pays Or Argent Bronze Total
1 Etats-Unis 46 29 29 104
2 Chine 38 27 23 88
3 Grande Bretagne 29 17 19 65
4 Russie 24 26 32 82
5 Corée du Sud 13 8 7 28
6 Allemagne 11 19 14 44
7 France 11 11 12 34
8 Italie 8 9 11 28
9 Hongrie 8 4 5 17
10 Australie 7 16 12 35
11 Japon 7 14 17 38
12 Kazakhstan 7 1 5 13
13 Pays-Bas 6 6 8 20
14 Ukraine 6 5 9 20
15 Nouvelle Zélande 6 2 5 13
16 Cuba 5 3 6 14
17 Iran 4 5 3 12
18 Jamaïque 4 4 4 12
19 République tchèque 4 3 3 10
20 Corée du Nord 4 0 2 6

 

(*1) ^ Techniquement parlant, l’hébergement des Jeux olympique incombe à une ville et non à un pays. Mais en réalité, l’évènement ne pourrait pas avoir lieu sans un soutien à l’échelle de la nation.

Faire les choses à la manière japonaise

Depuis quelques années, on entend dire que le Japon devrait, à l’instar de la Chine et de la Corée du Sud, « cibler » ses efforts sur quelques sports. Mais ces suggestions, qui ne servent qu’à renforcer le caractère national de la compétition, vont à l’encontre de l’esprit de la charte olympique.

Nous devons, me semble-t-il, accepter que le Japon ait sa propre façon de faire. Le patinage artistique masculin en offre une bonne illustration. Aux Jeux olympiques d’hiver de 2010, à Vancouver, Takahashi Daisuke a remporté la médaille de bronze. Les patineurs japonais participaient à cette épreuve depuis 1932, année des Jeux olympiques d’hiver de Lake Placid. Depuis cette date, le Japon a présenté 29 patineurs artistiques aux Jeux olympiques d’hiver, ceux de Vancouver y compris. Mais aucun d’entre eux n’avait ramené une médaille avant 2010. En prenant exemple sur la Chine et la Corée du Sud, on aurait parfaitement pu dire que le Japon aurait mieux fait de consacrer ses ressources à d’autres sports. Auquel cas l’exploit de Takahashi n’aurait jamais eu lieu.

Le Japon a semé la graine du succès et attendu 78 ans pour en cueillir le fruit. Il me semble que le sport japonais devrait en être fier.

Faire fructifier au mieux le succès du Japon

Mais revenons au score récent de 38 médailles. À mesure que les médailles pleuvaient en quelques jours — phénomène que les médias japonais ont baptisé « ruée vers les médailles » —, le pays tout entier a semblé galvanisé. Des voix se sont élevées au COJ pour exprimer l’espoir que ce score jouerait en faveur de Tokyo dans sa candidature pour accueillir les jeux de 2020.

Tokyo, Istanbul et Madrid sont les trois villes qui restent en lice pour héberger les jeux olympiques d’été en 2020. La décision finale interviendra en septembre 2013, lors de la réunion du Comité international olympique.

Istanbul s’est portée candidate pour tous les Jeux olympiques depuis l’année 2000. Cette tentative sera donc la cinquième et la capitale turque passe pour le grand favori. Si elle réussit, elle sera la première ville hôte située dans un pays musulman. Dans son cas, il y a toutefois des raisons de s’inquiéter, compte tenu du problème du maintien de l’ordre qui se pose. La Turquie partage en effet sa frontière méridionale avec la Syrie, ravagée à l’heure actuelle par la guerre civile. À moins que la situation ne s’améliore d’ici l’année prochaine, la sécurité est vouée à constituer une préoccupation majeure pour les membres du CIO au moment de voter.

En ce qui concerne Madrid, le principal point d’interrogation concerne la santé de l’économie nationale. Tout le monde se souvient des Jeux olympiques d’Athènes, en 2004, et de l’effet dévastateur que les dépenses excessives ont eu sur les finances publiques de la Grèce.

Qu’en est-il de Tokyo ? Un sondage d’opinion indépendant mené par le CIO dans chacune des trois villes candidates a estimé le soutien du public à 73 % à Istanbul, 78 % à Madrid et 47 % à Tokyo(*2). Il semble que les Japonais eux-mêmes ne voient pas vraiment pourquoi les Jeux olympiques devraient se dérouler pour la seconde fois chez eux.

Ni Noda Yoshihiko ni Ishihara Shintarô, respectivement premier ministre du Japon et gouverneur de Tokyo, ne se sont rendus à Londres pour la cérémonie d’ouverture. Si les hommes politiques sont vraiment convaincus que les Jeux olympiques doivent se tenir à Tokyo, ils doivent être les premiers à donner l’exemple. Le COJ a le devoir de faire fructifier le succès remporté à Londres par les athlètes japonais, et c’est maintenant qu’il doit agir.(20 août 2012)

Image du bandeau : les médaillés japonais des Jeux olympiques de Londres lors d’une conférence de presse donnée à Tokyo le 14 août 2012. Photo : Sankei Shimbun.

(*2) ^ Comité international olympique. Rapport du groupe de travail 2020 / Jeux de la XXXIIe Olympiade, 5 avril 2012.

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