Le b.a.-ba du Japon

Les condiments japonais

Culture Vie quotidienne Gastronomie

Les saveurs uniques de la gastronomie japonaise sont obtenues grâce aux condiments traditionnels. Les condiments fermentés faits à base de graines de soja et de kôji-kin, comme la sauce soja et le miso, sont des incontournables.

Les cinq condiments de base

Il est impensable de déguster des sushis sans sauce soja, des tempura sans ten-tsuyu, des soba sans tsuyu ou des râmen sans soupe. Les condiments sont la base de l’assaisonnement des plats japonais. On peut aisément mémoriser les cinq condiments de base grâce au syllabaire japonais. En effet, ils commencent tous par une lettre de la colonne sa (さ).

Sa : satô (sucre)
Shi : shio (sel)
Su : su (vinaigre de riz)
Se : shôyu(*1) (sauce soja)
So : miso

Cet ordre est idéal pour assaisonner les produits alimentaires. C’est le secret pour cuisiner de délicieux plats japonais.

Le développement de la sauce soja et du miso

Avec l’interdiction de consommer de la viande proclamée par l’empereur Tenmu en 675, ainsi que d’autres par la suite, les Japonais se sont tournés vers le konbu (algue) et la bonite pour apporter de la saveur à leurs plats. Jusqu’à la levée de l’interdiction par l’empereur Meiji en 1871, manger des viandes autres que celles issues de la chasse était tabou.

D’après le code de Taihô promulgué en 701, il existait dans la cour impériale des installations pour superviser la fermentation des céréales. C’est ainsi que les condiments fermentés tels que la sauce soja ou le miso se sont développés au Japon.

Graine de soja (à gauche), miso (derrière), sauce soja (devant)

Dans un pays humide comme le Japon, les moisissures se développent aisément. C’est grâce à ce climat que les Japonais ont développé au cours de nombreuses années des produits alimentaires fermentés. Par exemple, la sauce soja et le miso sont faits à base de graines de soja, de riz ou d’orge, et sont fermentés avec du sel et un champignon appelé kôji-kin (Aspergillus oryzae). Le kôji-kin est reconnu « champignon national » par la Société de brassage du Japon.

Le kôji-kin est aussi le ferment utilisé pour faire divers autres produits alimentaires essentiels : saké, mirin (une sorte de saké sirupeux et sucré), vinaigre de riz, katsuo-bushi (bonite séchée), shôchû (boisson distillée à partir de céréales), etc. Le Japon l’utilise depuis plus de 1 300 ans. Sushi, brochette yakitori, sukiyaki, tsukemono (légumes macérées), soupe miso : les condiments fermentés à partir de kôji-kin sont la base de la cuisine japonaise.

(*1) ^ Shôyu était autrefois écrit seuyu

Des condiments différents selon les régions

Chaque région du Japon possède ses propres condiments qui sont indispensables pour cuisiner les spécialités locales. Dans la préfecture d’Akita, le shottsuru, une sauce à base de poisson fermenté, est utilisé pour les nabe (fondue japonaise) et les râmen. (Voir notre article : La gastronomie japonaise de l’hiver : trois succulentes marmites « nabe »)

Le wasabi, présent dans les restaurants sushi du monde entier, a des effets antiseptiques. Le sanshô, qui s’accorde si bien avec l’anguille (unagi) grillée, aide la digestion.

À gauche : wasabi, à droite : yuzu et yuzu-koshô

Le jus et l’écorce de yuzu sont indispensables pour apporter des notes d’agrumes à un plat. L’assaisonnement yuzu-koshô est fait à partir de yuzu pelé, de sel et de piment qui sont mis à fermenter. C’est un assaisonnement plein de fraîcheur et de piquant originaire de l’île de Kyûshu. Depuis seulement une vingtaine d’années, il trouve le succès dans toute l’Archipel et est utilisé dans diverses préparations culinaires.

D’autres condiments indispensables à la cuisine japonaise sont le ponzu, à base de sauce soja et d’agrumes, le sucre wasanbon et les épices shichimi tôgarashi (mélange de sept épices dont du piment rouge) pour rehausser le goût des udon et des soba.

Umami, reconnu cinquième saveur

Tout comme le bouillon dans la cuisine française, le dashi est un composant essentiel de nombreux plats japonais. Il est préparé depuis des siècles avec du konbu et de la bonite séchée.

En 1908 le chercheur Ikeda Kikunae découvre que le konbu possède une forte quantité de glutamate – un type d’acide aminé – qui est à l’origine d’une saveur différente de l’acide, de l’amer, du salé et du sucré et décide de la nommer « umami ». Par la suite, on a découvert que de nombreux aliments, comme le jambon affiné, le fromage, la tomate ou l’anchois étaient riches en umami. En 2002, l’umami a été reconnue scientifiquement cinquième saveur de base. Aujourd’hui, les chefs du monde entier tentent de percer les mystères de l’umami afin de sublimer leurs créations culinaires.

Bande-annonce d’un film documentaire franco-japonais

Dashi and Shoyu: Essence of Japan (soutitre anglais)


Asia Documentary Production

Si vous désirez faire l’expérience d’un authentique dashi, préparé durant de longues heures avec du konbu et de la bonite séchée, l’adresse à ne pas manquer est le Nihonbashi Dashi Bar à Tokyo. Il est également possible de se faire un bol de dashi rapidement grâce aux sachets en poudre ou aux concentrés (sous forme liquide), qui sont vendus dans n’importe quel supermarché ou konbini. Ces condiments ont contribué à diffuser la culture gastronomique japonaise à l’étranger.

Lien externe : Nihonbashi Dashi Bar [EN]

Les mots comme saké ou wasabi sont aujourd’hui communément utilisés dans le monde entier. Un jour, d’autres termes comme dashi ou konbu seront sans doute aussi répandus. Dans une goutte de sauce soja, bien des choses sont concentrées : un savoir-faire millénaire, un climat et un terroir de qualité, et l’énergie invisible du monde naturel. Ces condiments sont la clé pour l’évolution future de la gastronomie japonaise.

(Photo de titre : quatre types de sauce soja proposés lors d’un repas gastronomique dans l’auberge traditionnelle Mari sur l’île Shôdoshima.)

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