En avant les énergies renouvelables !

L’électricité photovoltaïque et géothermique

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Depuis la catastrophe du 11 mars 2011, les énergies renouvelables suscitent un intérêt croissant. L’énergie solaire a enregistré des progrès considérables dès avant cette date pivot, à la différence de l’énergie géothermique, dont le potentiel est encore loin d’être exploité. Nous allons nous intéresser aux raisons de cet écart.

L’énergie solaire photovoltaïque au Japon et dans le monde

En 2010, la capacité de production d’électricité photovoltaïque atteignait 3,62 GW au Japon. Premier producteur mondial avant le développement rapide du secteur en Allemagne et en Espagne à partir de 2004, le Japon occupe aujourd’hui le 3e rang mondial (Graphique 1).

Graphique 1 : Capacité de production d’électricité photovoltaïque

L’une des caractéristiques de la production d’électricité photovoltaïque au Japon est que 80% des installations concernent des maisons individuelles. Ce ratio est quasiment inversé en Occident, où la majorité des installations photovoltaïques sont utilisées hors de l’habitat, pour la production commerciale d’électricité notamment.

Graphique 2 : Installations photovoltaïques par type (2010)

Depuis les années 1990, le Japon subventionne l’installation de panneaux photovoltaïques résidentiels et les compagnies d’électricité rachètent les surplus d’électricité de leurs usagers. Ces mesures, ainsi qu’une prise de conscience croissante sur les questions environnementales, ont encouragé les Japonais à s’équiper. La catastrophe de mars 2011 renforce la motivation à s’assurer un approvisionnement en électricité en cas de catastrophe naturelle.

En 2010, 52% des maisons neuves construites par les huit plus grands entrepreneurs du pays étaient équipées de panneaux solaires, d’après une étude réalisée en 2011 par l’Institut de recherche Yano. Cela ne signifie pas pour autant que les rues du Japon sont bordées de maisons équipées de panneaux solaires sur leur toit, car une proportion importante de maisons neuves sont construites par des entrepreneurs indépendants, qui proposent peut-être moins volontiers cette possibilité. Ce pourcentage est néanmoins significatif, dans la mesure où il souligne l’évolution de l’attitude des consommateurs japonais vis-à-vis de l’énergie photovoltaïque.

Les panneaux solaires peuvent couvrir la plus grande partie du toit (à gauche) ; une maison équipée d’une unité de production d’électricité photovoltaïque (à droite). (Photos : Daiwa House Industry)

 

L’impact du rachat à tarif garanti

Un système de rachat à tarif garanti de l’électricité produite par les énergies renouvelables, y compris solaire, est entré en vigueur en juillet 2012. Ce système garantit, sur une période déterminée, le rachat de l’électricité excédentaire des foyers par les compagnies d’électricité, à un prix fixé à l’avance. Cette mesure vise à encourager le développement de l’énergie solaire photovoltaïque, malgré les coûts d’installation élevés. Des acteurs de secteurs industriels variés, et pas seulement les compagnies d’électricité, se sont ainsi engagés sur le marché de l’électricité photovoltaïque.

C’est par exemple le cas du célèbre entrepreneur Son Masayoshi et de sa nouvelle entreprise, SB Energy. M. Son est aujourd’hui la troisième personnalité la plus riche du Japon, d’après la revue Forbes ( Japan’s 40 Richest ), un statut qu’il doit à sa bonne gestion de l’opérateur de téléphonie mobile Softbank, le premier à avoir commercialisé l’iPhone d’Apple au Japon. SB Energy, créée en octobre 2011, a commencé à gérer son premier complexe « mégasolaire », une énorme installation de production d’électricité solaire, en juillet 2012. De leur côté, les entrepreneurs Ôbayashi et Daiwa House Industry ont également pris pied sur le marché du mégasolaire en équipant de panneaux photovoltaïques le toit de leurs centres logistiques et entrepôts.

Les combini aussi, ces supérettes ouvertes 24h sur 24 qui font partie intégrante de la vie quotidienne des Japonais, sont dynamiques dans ce domaine. En deux ans, Lawson a équipé de panneaux solaires le toit de 2000 de ses points de vente, et profite aujourd’hui du système de rachat de l’électricité photovoltaïque à tarif garanti pour se lancer sur le marché de la vente d’électricité. En mai 2012, Seven-Eleven Japan avait également équipé plus de 1400 points de vente, dans le cadre de sa stratégie globale d’économies d’énergie.

Il ne fait aucun doute que le Japon utilisera de plus en plus d’énergie solaire photovoltaïque à l’avenir. Mais, à l’heure actuelle, cette source d’énergie fournit moins de 1% de l’électricité japonaise et son évolution est difficilement prévisible. Dans son scénario pour l’énergie solaire, le ministère de l’économie, du commerce et de l’industrie table sur une multiplication par vingt de la capacité des installations photovoltaïques, dont la production passerait ainsi de 1,4 GW en 2005 à 28 GW en 2020.

Un potentiel géothermique de rang mondial

Le Japon possède beaucoup de volcans, en sommeil ou actifs, qui laissent deviner son potentiel géothermique.

La production d’énergie géothermique consiste à générer de l’électricité en pompant l’eau sous haute pression et à haute température qui se trouve à une certaine profondeur sous la surface de la Terre, la vapeur ainsi obtenue faisant fonctionner des turbines. Cette méthode de production basée sur la seule utilisation de la chaleur du magma terrestre ne produit quasiment aucune émission de dioxyde de carbone. Contrairement aux énergies éolienne et solaire, elle ne subit pas de variations liées aux saisons ou au climat et est disponible 24 heures sur 24.

Le Japon est l’un des pays les plus volcaniques du monde, comme le symbolise le célèbre mont Fuji qui, même s’il n’a connu aucune éruption depuis plus de 300 ans, reste néanmoins un puissant volcan endormi.

Le Japon possède la troisième capacité mondiale en termes de ressources géothermiques, après l’Indonésie et les Etats-Unis. Trois entreprises japonaises construisent 70% des turbines pour l’électricité géothermique du monde entier, et peuvent s’enorgueillir des meilleures technologies du secteur. Cependant, en ce qui concerne les centrales géothermiques sur son propre territoire, le Japon est à la traîne au niveau mondial, en huitième position seulement (tableau 3). Malgré la richesse de ses ressources géothermiques, l’Archipel est loin d’en tirer le meilleur parti.

Graphique 3 : centrales géothermiques dans le monde (2010)

 

La voie de l’énergie géothermique

Pourquoi l’énergie géothermique n’est-elle pas devenue une source majeure d’électricité au Japon ? Outre les problèmes particuliers soulevés dans tous les pays par cette source d’énergie — délais longs entre les premières études et la construction, coûts élevés, risque lié à l’exploitation —, le Japon est confronté à d’autres questions.

La centrale géothermique de Yanaizu-Nishiyama, exploitée par la compagnie d’électricité du Tôhoku, est située près de sources thermales naturelles (photo : Compagnie d’électricité du Tôhoku).

Tout d’abord, 80% des ressources géothermales du pays sont situées dans des parcs nationaux ou assimilés. L’exploitation de ces zones est strictement contrôlée pour protéger l’environnement, et il est difficile d’y construire des centrales électriques. Cependant, vu l’importance croissante prise par les énergies renouvelables depuis la catastrophe du 11 mars 2011, les autorités ont assoupli les réglementations pour faciliter la construction de telles installations dans les parcs nationaux, à certaines conditions. En août 2012, le ministère de l’environnement a annoncé une initiative destinée à « assurer la croissance verte » et à « mettre en œuvre rapidement les énergies renouvelables », qui devrait donner un sérieux coup de pouce à l’énergie géothermique.

Une autre question est la cohabitation avec les sources thermales touristiques, nombreuses dans les environs de la plupart des centrales électriques géothermiques du Japon. L’exploitation de cette source d’énergie pourrait s’avérer difficile sans la coopération des localités touristiques, inquiètes du possible impact du pompage sur la qualité et la quantité des eaux thermales.

Les sources thermales sont un secteur touristique de premier plan au Japon. D’après l’Institut de recherche Nippon Onsen, en 2010, on dénombrait au Japon 3 185 sources thermales touristiques attirant en tout plus de 120 millions de visiteurs par an. La valeur touristique d’un site, en termes d’attrait et de fréquentation, est souvent intimement liée à l’existence d’une source thermale naturelle, et son assèchement porterait un coup fatal à l’industrie touristique de la région. Il n’est donc pas étonnant que la perspective de la construction d’une centrale géothermique constitue une source d’inquiétude pour les propriétaires et les gérants de sites de thermalisme.

Les partisans de cette technologie soulignent le fait que la production d’électricité géothermique utilise l’eau chaude située dans des couches bien plus profondes que celles qui alimentent les sources thermales. De plus, le risque pour les sources est faible, dans la mesure où l’eau est rendue aux sous-sols après usage. Mais ces arguments ne suffisent pas à apaiser les inquiétudes des gérants de sources thermales. Dans certaines centrales géothermiques en activité, la compagnie d’électricité a réussi à dissiper ces craintes et la cohabitation avec les sites de thermalisme s’accompagne de la fourniture de certains services, notamment des générateurs autonomes en cas d’urgence ou le soutien à l’exploitation de nouvelles sources touristiques. Pour que les deux parties travaillent en bonne entente, il est nécessaire d’établir une collaboration de cette sorte, basée sur un objectif commun d’utilisation efficace des ressources géothermiques. Un partage transparent de l’information et une surveillance continuelle de l’état des sources sont également indispensables.

Le système de rachat à tarif garanti de l’électricité produite par les énergies renouvelables, mis en œuvre au mois de juillet 2012, concerne aussi l’énergie géothermique. Il sera intéressant de voir si cette source d’énergie se développe réellement au Japon, stimulée par ces subventions et par l’assouplissement des réglementations concernant les parcs nationaux.

(D’après un article en japonais de Kimura Ryôji)

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