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Les jeunes Japonais et l’amour

Société

Une enquête récente réalisée au Japon a révélé qu’une grande partie des célibataires de 18 à 34 ans de l’Archipel – 70 % pour les hommes et 60 % pour les femmes – n’entretiennent pas de relation amoureuse. D’après les spécialistes, plusieurs facteurs économiques et sociaux seraient à l’origine de ce phénomène pour le moins surprenant.

Près du tiers des jeunes célibataires japonais ne semblent pas intéressés par l’amour

À l’occasion d’une enquête effectuée en 2015 par l’Institut national de recherches sur la population et la sécurité sociale japonais (NIPSSR), plus de la moitié des célibataires de 18 à 34 ans interrogés ont déclaré qu’ils n’avaient aucune relation amoureuse(*1). La proportion des hommes dans ce cas de figure était de 69,8 %, et celle des femmes de 59,1 % (voir Figure 1). Ce qui constitue une nette progression par rapport à la même étude réalisée cinq ans auparavant par le NIPSSR où les chiffres étaient respectivement de 61,4 % et de 49,5 %. Qui plus est, 30,2 % des hommes et 25,9 % des femmes de cette tranche d’âge ont dit qu’ils ne cherchaient pas à nouer de relation. Toutefois plus de 80 % des jeunes adultes interrogés ont exprimé le désir de se marier un jour.

En 2015, la proportion des personnes interrogées affirmant être engagées dans une relation amoureuse était de 19,7 % pour les hommes et de 27,3 % pour les femmes. Des résultats qui étaient légèrement inférieurs à ceux obtenus en 2010. Il semble donc que l’amour joue un rôle de moins en moins important dans la vie des jeunes adultes de l’Archipel. Le pourcentage des célibataires de 18 à 34 ans entretenant une relation a atteint son point culminant (33,1 %) en 2002 chez les femmes, et en 2005 chez les hommes (24,3 %). Au cours des dix dernières années, ces chiffres ont baissé d’environ 5 % chez les deux sexes.

Des jeunes adultes sans aucune expérience sexuelle

Le nombre des Japonais de 18 à 34 ans ayant déclaré n’avoir jamais eu la moindre relation sexuelle a lui aussi progressé depuis la première décennie du XXIe siècle. Si l’on observe les courbes du graphique ci-dessous (Figure 2), on constate qu’à partir de 2005, elles cessent de s’infléchir et commencent à remonter chez les hommes comme chez les femmes. Par ailleurs, la différence entre les deux sexes sur ce point s’est considérablement réduite.

Évolution du pourcentage des jeunes célibataires japonais n’ayant jamais eu de relation sexuelle (par tranche d’âge)

1992 1997 2002 2005 2010 2015
Hommes
18-19 ans 70,9 % 64,9 % 64,2 % 60,7 % 68,5 % 72,8 %
20-24 ans 42,5 % 35,8 % 34,2 % 33,6 % 40,5 % 47,0 %
25-29 ans 24,8 % 25,3 % 25,6 % 23,2 % 25,1 % 31,7 %
30-34 ans 22,7 % 23,4 % 23,4 % 24,3 % 26,1 % 25,6 %
Total
(18-34 ans)
41,5 % 35,7 % 35,3 % 31,9 % 36,2 % 42,0 %
Femmes
18-19 ans 77,3 % 68,3 % 62,9 % 62,5 % 68,1 % 74,5 %
20-24 ans 53 % 42,6 % 38,3 % 36,3 % 40,1 % 46,5 %
25-29 ans 44,4 % 34,1 % 26,3 % 25,1 % 29,3 % 32,6 %
30-34 ans 40,9 % 28,8 % 26,6 % 26,7 % 23,8 % 31,3 %
Total
(18-34 ans)
56,3 % 43,5 % 37,3 % 36,3 % 38,7 % 44,2 %

Dans le même temps, la proportion des célibataires de l’Archipel qui aimeraient se marier reste aussi élevée que toujours – 85,7 % des hommes et 89,3 % des femmes. En 2015, l’âge moyen envisagé pour le mariage était 30,4 ans, comme en 2010, pour les hommes. Et 28,7 ans, contre 28,4 ans cinq ans auparavant, pour les femmes.

La peur de l’échec

Pourquoi les jeunes adultes japonais ont-ils tendance à s’impliquer de moins en moins dans des relations amoureuses ? Kitamura Kunio, président de l’Association japonaise du planning familial, estime que trois facteurs ont grandement contribué à cet état de choses. D’abord la difficulté à communiquer propre à cette catégorie de la population, ensuite le manque d’argent et enfin le développement des services proposés par Internet.

« Se lancer dans une histoire d’amour et s’y investir demande beaucoup d’efforts », précise-t-il.  « Des efforts que de plus en plus de jeunes Japonais n’ont aucune envie de faire parce qu’ils ont peur d’être rejetés. Leur attitude s’explique aussi par des raisons d’ordre économique. Le nombre des jeunes de 18 à 34 ans qui n’arrivent pas à trouver un travail stable ne cesse d’augmenter. Et ceci a pour effet de créer un clivage social entre ceux qui ont un bon emploi et peuvent se permettre de tomber amoureux et les autres, qui n’ont pas cette chance et se retrouvent seuls. »

(D’après un article original en japonais. Photo de titre : un jeune couple au milieu d’un groupe de moutons disposés de façon à former un cœur, à l’occasion de la Saint Valentin, dans le parc à thème Mother Farm de Futtsu, dans la préfecture de Chiba. Jiji Press)

(*1) ^ Les résultats de l’enquête nationale sur la fécondité réalisée en 2015 par l’Institut national de recherches sur la population et la sécurité sociale japonais ont été rendus publics le 15 septembre 2016. L’échantillon considéré se composait de 8 754 célibataires choisis au hasard dans 900 localités différentes. 5 276 d’entre eux avaient entre 18 et 34 ans. Les questions portaient exclusivement sur les relations hétérosexuelles. Les rapports entre partenaires de même sexe n’ont pas du tout été pris en considération.

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