Le b.a.-ba du Japon

O-bon : la fête en l’honneur des ancêtres

Culture Vie quotidienne

Une des trois périodes de vacances les plus importantes du calendrier japonais, avec le Nouvel An et la Golden Week, la fête O-bon a pour objet de vénérer les esprits des ancêtres. Un évènement pendant lequel on rend visite aux tombes familiales, mais qui est aussi fêté dans la joie avec les danses « bon odori ».

La plupart des pays du monde ont des fêtes en l’honneur des ancêtres. Au Japon, cette fête s’appelle « Bon » (ou O-bon avec un prefixe de politesse) et consiste à accueillir les esprits des aïeuls dans la maison et à leur rendre hommage.

À l’origine, elle était tenue au 15e jour du septième mois du calendrier lunaire traditionnel. Aujourd’hui, la période de l’O-bon varie parfois selon les régions mais correspond en principe aux 4 jours allant du 13 juillet, jour de « Mukae bon » (l’accueil des esprits), jusqu’au 16, jour d’« Okuri bon » (leur raccompagnement).

Dans beaucoup de régions, l’O-bon est célébré du 13 au 15 août, en suivant le calendrier solaire.  Pendant cette période qui tombe au milieu des vacances scolaires, la famille se réunit et où, dans de nombreuses régions, sont organisées les danses bon odori. Beaucoup d’entreprises accordent à leurs employés quelques jours de vacances à cette occasion.

Dans la tradition bouddhiste, cette fête s’appelle « Ura-bon-e » (Ullambana en sanskrit), pour « Bon matsuri » dans la version shintô. D’après la légende Ura-bon-e, Mokuren, disciple du Bouddha, aurait imploré la miséricorde de ce dernier et aurait ainsi sauvé sa mère de la tourmente du gakidô, l’enfer des êtres affamés. C’est ainsi qu’est née la tradition d’honorer sa famille défunte qui est devenue l’une des fêtes les plus populaires de l’année après le Nouvel An, à partir de l’époque d’Edo (1603-1868).

À Numazu, dans la préfecture de Shizuoka, des habitants allument des feux, les mukae-bi, en direction de la mer afin de guider les esprits des ancêtres

Le folklore autour de l’O-bon

Le 13 juillet, on allume des feux de bois de chanvre à l’entrée des maisons afin de guider et de faire venir les esprits des disparus. Les feux de cette tradition du mukae-bi sont remplacés aujourd’hui, pour des raisons pratiques, par des lanternes électriques. On rend hommage aux esprits revenus en préparant l’autel bon dana, également appelé shôryô dana.

Selon la tradition, on dispose dans l’autel des branches de bambou qui sont entourées d’une corde. On y suspend une guirlande de hoozuki (physalis ou alkékenge) dont le cœur orangé symbolise le feu accueillant les esprits et l’on place sur les étagères divers objets comme les tablettes portant les noms des ancêtres (ihai), des fleurs, des fruits et des légumes de saison, sans oublier les shôryô-uma.

Les shôryô-uma sont les animaux permettant aux esprits des ancêtres de faire l’aller-retour entre l’au-delà et notre monde et de les accueillir de manière courtoise. C’est sur le dos du cheval rapide, représenté par un concombre, que les esprits arrivent dans la maison, et c’est sur celui d’une vache, représentée par une aubergine, qu’ils retournent, lentement mais sûrement, dans l’autre monde.

Shôryô-uma, un concombre pour le cheval et une aubergine pour la vache.

Le 16 juillet, sont allumés les okuri-bi ou feux du retour, pour souhaiter un bon retour aux ancêtres et éclairer leur chemin vers l’au-delà. Le Gozan no okuribi (un gigantesque feu en forme de kanji 大 signifiant « grand » allumé de nuit dans la montagne) qui a lieu à Kyoto, est la fête d’été la plus spectaculaire et la plus fréquentée des touristes. Dans certaines régions, la coutume du syôrô nagashi (ou tôrô nagashi), consistant à laisser dériver des lanternes en papier sur un fleuve, perdure même si pour des raisons environnementales cette pratique est maintenant interdite dans beaucoup d’endroits.

Lanternes à la dérive pour la fête de Kinokawa, préfecture de Wakayama, en 2006.

La danse « Bon odori »

Bon odori se danse afin d’accueillir, de calmer et de raccompagner les esprits. Même si elles ont perdu leur signification d’origine pour devenir de joyeuses célébrations de l’été, ces danses sont aujourd’hui encore organisées dans les temples et sur les places des villages. Il existe deux types de danses, les danses wa odori, ou danses en cercle, où les danseurs évoluent autour d’une estrade surélevée, yagura, sur laquelle des joueurs de tambours japonais donnent le rythme, et les danses nagashi odori ou danses circulaires. Les exemples les plus célèbres de ces danses sont la Gujô odori de la préfecture de Gifu pour le style wa odori, et l’Awa odori de la préfecture de Tokushima pour le genre nagashi odori.

Selon une enquête menée par Oricon Style, le morceau de musique le plus joué pour la danse bon odori est « Sôran bushi », une chanson populaire originaire de Hokkaidô souvent apprise aux écoliers, suivi par « Tokyo ondo » en 2e place et par « Doraemon ondo », composé à partir du dessin animé Doraemon, en 3e place.

Basée sur la répétition d’un même mouvement, la chorégraphie des chansons de bon odori est relativement simple et permet à tout le monde d’y participer. Le port du yukata, un kimono d’été en coton, est vivement conseillé pour s’intégrer davantage à l’atmosphère.

En Amérique du Sud, la danse bon odori possède, comme le sushi et le karaoké, sa version locale et sa place dans le dictionnaire. En Argentine, plus de 10 000 personnes des villages alentours de La Plata se rassemblent chaque année, de nombreux stands font leur apparition pour l’occasion et des Argentins d’origines diverses, japonaise, espagnole, italienne, s’habillent en yukata et dansent jusqu’au milieu de la nuit. L’O-bon offre ainsi aux peuples des deux hémisphères l’occasion de former une ronde au son de la musique et de faire la fête ensemble dans la joie.

(Photo des mukae-bi à Numazu prise par Batholith en 2012)

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