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Le « shuntô » : les offensives salariales de printemps au Japon

Économie Travail

Depuis 1955 les syndicats japonais mènent annuellement un bras de fer collectif avec la direction des entreprises. C’est ce qu’on appelle le shuntô, les négociations salariales de printemps.

Le shuntô (littéralement « combat de printemps »), désigne la négociation collective des syndicats avec la direction des entreprises concernant l’augmentation des salaires et les autres améliorations des rémunérations. Son histoire remonte à 1955 : chaque printemps, les syndicats des entreprises individuelles présentent des demandes spécifiques à leur direction, s’engageant ainsi dans une négociation collective. Ces demandes sont au préalable résumées dans un texte coordonné et rédigé par la Confédération japonaise des syndicats (Rengô), par l’organisation centrale des syndicats ou par les syndicats industriels.

Comme l’explique le site du Rengô, puisque de nombreuses entreprises japonaises ont leur année fiscale qui s’étend du 1er avril au 31 mars de l’année suivante, les syndicats négocient en février et en mars l’augmentation salariale et les autres conditions de travail pour l’année fiscale à venir. Le Rengô considère ces discussions comme la plus grosse bataille de l’année pour les syndicats envers le patronat et les désignent sous le nom de shuntô.

La présidente de la Confédération japonaise des syndicats (Rengô), Yoshino Tomoko, lors d’un discours au forum sur la gestion du travail le 24 janvier 2024 à Tokyo.
La présidente de la Confédération japonaise des syndicats (Rengô), Yoshino Tomoko, lors d’un discours au forum sur la gestion du travail le 24 janvier 2024 à Tokyo.

Les négociations syndicales de printemps ont débuté en 1955 lorsque huit organisations industrielles, comprenant notamment les secteurs ferroviaire, minier et de la machinerie électrique, se sont unies pour négocier des revendications similaires pendant la même période de printemps. Ces organisations pensaient que les syndicats, en travaillant ensemble, renforceraient leur pouvoir de négociation avec la direction. Ôta Kaoru, ancien président du Conseil général des syndicats du Japon (Sôhyô), l’une des organisations ayant précédé le Rengô et qui a été dissoute en 1989 lors de la fondation de celui-ci, a proposé et établi le système des négociations salariales de printemps. Il avait notamment déclaré : « Si l’on marche seul dans une rue sombre la nuit, on peut rapidement se sentir anxieux, mais on peut facilement retrouver la tranquillité si tout le monde se donne la main et marche ensemble. »

L’objectif des négociations salariales de printemps est l’augmentation des revenus, qui comprend le salaire de base ( « base-up » ) et l’augmentation du revenu annuel. Avec l’augmentation du salaire de base, le niveau des revenus est relevé pour tous, entraînant une structure salariale globale plus élevée. Elle signifie toutefois des coûts de main-d’œuvre plus élevés pour les entreprises.

L’augmentation du revenu annuel représente une croissance progressive du salaire de base selon l’âge ou l’ancienneté d’un employé. Elle ne change donc pas le niveau global du salaire de base. C’est le « base-up » qui est étroitement surveillé lorsque les prix augmentent.

Évolution de l’augmentation des taux annuels lors du shuntô

Pour le shuntô 2024, en tenant compte de la croissance négative des salaires réels due à un taux d’inflation record, le Rengô a renforcé sa demande d’augmentation combinée du salaire de base et annuel d’« environ 5 % ». Le 7 mars, les données préliminaires ont montré que la moyenne de la hausse réclamée par les membres de la Confédération cette année a atteint 5,85 %. C’est la première fois en 30 ans que ce chiffre dépasse les 5 %.

(Photo de titre : un membre du syndicat japonais de la métallurgie écrit sur un tableau les réponses aux négociations salariales de 2023, le 15 mars 2023 dans l’arrondissement de Chûô, à Tokyo. Jiji)

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