Les athlètes japonais en route vers la victoire olympique
Araki Erika : l’inarrêtable capitaine de l’équipe de volley-ball qui veut briller devant sa fille
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Un faux départ dans la compétition
Araki Erika n’a pas un bon souvenir de sa première sélection pour les Jeux olympiques. Pré-sélectionnée en 2004, à l’âge de 19 ans, elle n’a pas été retenue pour participer aux JO d’Athènes cette année-là.
Aujourd’hui, elle voit cet échec comme une source d’énergie. « J’ai eu beaucoup de mal à l’accepter, mais il m’a aussi permis de rebondir. Je pense que c’est grâce à ça que j’ai pu continuer jusqu’à aujourd’hui. Et ne pas avoir pu être choisie aux Jeux d’Athènes me semble aujourd’hui une bonne chose. »
Son absence aux Jeux d’Athènes lui a fait douloureusement prendre conscience de ses insuffisances techniques. Elle a commencé à s’entraîner à fond, afin d’améliorer son jeu et sa force.
Sa position est arrière centre. Ce qui la différencie de ses prédécesseuses dans ce poste est non seulement sa rapidité, mais aussi sa puissance, et sa faculté à créer des attaques diverses en combinaison avec les autres. Elle est devenue une présence indispensable à l’équipe japonaise. Voici ce qu’elle en disait avant les Jeux olympiques de Beijing en 2008 : « Je veux garder cette position. C’est justement parce qu’il m’a fallu des années pour l’obtenir que je suis sûre de mieux la comprendre que quelqu’un qui l’aurait eu tout de suite. »
Aux Jeux de Beijing, les premiers pour elle, elle a été la meilleure arrière centre du tournoi en jouant contre des joueuses étrangères plus grandes et plus expérimentées qu’elle.
Une présence indispensable à la sélection japonaise
En 2008-2009, immédiatement après les Jeux de Beijing, elle a passé un an dans l’équipe de série A italienne Foppapedretti de Bergame, réputée pour son excellence, où elle a pu élargir sa vision du jeu. Sa puissance et sa technique ont évolué et elle a entrepris de renforcer son point faible, le jeu défensif.
Aux Jeux olympiques de Londres en 2012, elle était le capitaine de l’équipe japonaise qui a obtenu la médaille de bronze, ce qui n’était pas arrivé au volley-ball féminin japonais depuis 28 ans. Elle a aussi joué aux Jeux de Rio de Janeiro en 2016. Ces dernières années, elle fait beaucoup d’efforts pour renforcer son service et continue, malgré ses 36 ans, à être la meilleure arrière centre japonaise.
Sa grossesse l’année suivante l’a éloignée des courts, mais elle y est revenue environ six mois après la naissance de sa fille. Pendant la saison 2014-2015 de la Ligue japonaise de volley-ball, elle a été la première au classement des points marqués au bloc, et la troisième à celui des points marqués en attaque, un résultat qui n’a pas fait sentir son absence d’un an.
Au Japon, il y a encore très peu de sportives de haut niveau qui continuent leur carrière après avoir eu un enfant. Mais Araki Erika avait vu en Italie des joueuses pour qui cela était tout à fait normal, et elle a décidé de ne pas renoncer à sa carrière après son accouchement, grâce aussi au soutien de sa mère et de son mari. Et elle a rapidement réussi comme prévu son retour dans sa discipline, en retrouvant le plus haut niveau de performance qui était le sien. Mais elle a ensuite dû faire face à un risque imprévu qui aurait pu l’amener à mettre fin à sa carrière.
Redécouvrir le plaisir de jouer après un problème cardiaque
Araki Erika, qui avait fait une bonne saison 2014-2015 a de nouveau été sélectionnée pour l’équipe nationale en 2015. Mais l’examen médical préliminaire à ce retour a mis au jour une arythmie cardiaque qui lui a valu une hospitalisation. Jouer avec la sélection japonaise n’était plus d’actualité.
Lorsque les médecins lui ont dit qu’elle courrait le risque de mourir subitement, elle a été sidérée. D’après eux, elle devait renoncer au sport.
« D’abord, l’idée que le volley-ball pouvait finir ainsi pour moi m’a stupéfiée. Mais quelque part en moi, je me disais aussi que cette raison me permettait quelque part d’échapper à ce sport. »
Quand elle a appris après de multiples examens que son problème cardiaque pouvait être résolu par une opération, sa passion pour le sport s’est réveillée à nouveau. Opérée par cathétérisme cardiaque, elle a ensuite suivi un traitement qui lui a permis de participer à la saison 2015-2016 de la ligue japonaise de volley-ball.
Aujourd’hui, Araki surveille de très près sa condition physique, et fait encore plus attention à sa nutrition et à son corps. Malgré son absence à l’entraînement estival en 2015 en raison de sa convalescence, c’est elle qui a obtenu pour la saison 2015-2016 le prix de la meilleure arrière centre, montrant une force inégalée.
2016 a vu son retour dans la sélection nationale, et sa troisième participation aux Jeux olympiques, à Rio de Janeiro.
Être mère et athlète : deux statuts en conflit ?
Ce retour dans la sélection nationale a fait naître une nouvelle difficulté : les stages de préparation et les matchs créent de longues périodes pendant lesquelles elle ne voit pas sa fille.
Si le soutien d’Araki Erika pour son enfant a été total les premiers mois après sa naissance, sa fille supportait très mal l’absence de sa mère une fois que celle-ci avait repris le chemin de la compétition. Araki Erika est incapable de dire combien de fois sa fille a pleuré en la suppliant de ne pas partir. L’enfant a même essayé à plusieurs reprises de l’empêcher de franchir la porte d’entrée de leur domicile par une barricade improvisée ou de la ficelle.
L’objectif ultime qu’Araki Erika s’est fixé dans sa carrière est d’obtenir une médaille aux Jeux de Tokyo. Elle donne tout pour cela. Mais sa fille n’en a que faire. Elle comprend que c’est le volley-ball qui éloigne sa mère d’elle et lui demande souvent de renoncer à ce sport.
Bien sûr, qui ne souffrirait pas des protestations compréhensibles de son enfant. Malgré tout, la détermination d’Araki Erika de participer aux Jeux de Tokyo est inchangée.
« C’est difficile à supporter, mais puisque j’ai décidé du chemin que je voulais prendre, je compte bien ne pas abandonner. Je me donnerai à fond jusqu’à la fin des Jeux. J’explique à ma fille qu’enfant déjà, je rêvais de jouer au volley-ball au plus haut niveau, et que mon rêve s’est réalisé, puisque je fais ce que j’aime tant. Mais du point de vue de ma fille, ça ne change pas grand-chose, elle préférerait que je sois toujours là pour elle », explique Araki en riant.
Araki Erika espère que le jour où sa fille aura trouvé ce pour quoi elle sera prête à tout donner, elle se souviendra de ce que sa mère lui disait.
Sa fille est aujourd’hui en deuxième année d’école élémentaire. Pour la Fête des mères, elle a cassé sa tirelire pour lui offrir un porte-clé composé de deux parties qui, une fois réunies, forme une image de chien. Elle dit à sa mère qu’elle en gardait la moitié, et lui a demandé de toujours avoir l’autre sur elle, afin que l’objet les réunisse. Et elle a écrit dans la lettre qui accompagnait son cadeau : « Je t’aime maman qui te donne tant de mal. Moi aussi, je fais comme toi ! »
Pendant les JO de Tokyo, Araki Erika s’est juré de faire voir à sa fille, la personne dont le regard compte pour elle le plus au monde, sa mère en train de jouer comme arrière-centre le sourire aux lèvres.
(Photo de titre : Araki Erika, capitaine de l’équipe nationale de volley-ball, pleine de fougue lors du match contre la Chine le 1er mai 2021 au Tokyo Ariake Arena. Photo : Yutaka/Aflo Sports)