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Farida Yumi, ambassadrice au Japon d’un art de la scène arabe : la danse du ventre

Culture

La danseuse et chorégraphe japonaise Farida Yumi s’est donné pour objectif d’approfondir les échanges culturels entre les mondes arabes et japonais en apportant au Japon les rythmes complexes et les mouvements expressifs de la danse du ventre. Nous avons rencontré Farida pour parler de son histoire et de l’attrait de cet art de la scène ancestral.

Farida Yumi FARIDA Yumi

Danseuse et chorégraphe. Elle s’est lancée dans l’étude de la danse du ventre en 2003 après avoir assisté à une représentation de cet art de la scène en Allemagne. En tant que professionnelle, elle a remporté plusieurs concours au Japon et à l’étranger. Elle a fondé son propre studio de danse en 2014 et enseigne aujourd’hui à Tokyo, Chiba et Fukushima. Elle s’est mise à l’étude de la langue et de la calligraphie arabes à l’Institut arabo-islamique de Tokyo en 2018 et a obtenu son diplôme en janvier 2021. En janvier 2020, elle a été la première japonaise à se produire avec la Troupe nationale égyptienne de dance folklorique, à l’occasion d’un spectacle donné à Hong Kong pour célébrer le sixième anniversaire de la fondation de ce groupe.

Depuis quelques temps, la danse du ventre fait fureur au Japon. Ces dernières années, cette activité fort expressive a attiré un nombre croissant de fans séduits par ses costumes bigarrés, ses rythmes fascinants et ses mouvements évocateurs, ainsi que par les effets bénéfiques qu’elle est censée avoir sur la santé. Farida Yumi, danseuse et chorégraphe active à Tokyo et dans d’autres préfectures, se félicite de l’essor de cette ancienne forme de danse. Depuis 2003, année où elle a fait ses débuts dans la danse du ventre, elle s’est fait remarquer pour son talent dans l’Archipel comme à l’étranger. Elle se produit au Japon, où elle possède en outre son propre studio, mais lorsqu’elle regarde en arrière, elle reconnaît n’avoir jamais envisagé que son intérêt pour la culture égyptienne l’amènerait là où elle est arrivée.

Les débuts dans la danse

Farida dit qu’elle est fascinée par la culture arabe et moyen-orientale, notamment la civilisation égyptienne, depuis sa plus tendre enfance. Passionnée de voyages, elle s’est rendue six fois en Égypte, où la richesse de la culture et des vestiges des royaumes d’autrefois l’ont enchantée. D’un autre côté, son goût pour la danse la portait davantage vers les rythmes entraînants de la samba brésilienne que vers les mouvements giratoires des spectacles de danse auxquels elle a assisté au Caire. Toutefois, lors de ses études en Allemagne, une représentation de danse du ventre lui a ouvert les yeux sur cet art. Captivée par ce spectacle, elle en est devenue adepte.

Farida a commencé sa formation auprès de Lubna Imam, une danseuse égyptienne spécialisée dans la danse traditionnelle et folklorique. Elle a effectué de fréquents voyages en Égypte pour participer à des stages dirigés par son professeur, mais, depuis le début de la pandémie, c’est en ligne qu’elle prend ses cours.

L’une des premières découvertes de Farida a été l’abondante diversité de la danse du ventre selon les régions. L’opinion qui prévaut est que ce style de danse est né en Égypte, mais certains chercheurs situent son origine dans d’autres régions, notamment la Turquie. Tout bien considéré, les milliers d’années d’histoire que compte cette danse rendent impossible de lui attribuer un lieu de naissance bien défini, et on ne s’étonnera pas que tous les pays de la région proclament être le berceau de ce style.

Une danse appréciée des femmes

L’histoire de la danse du ventre professionnelle au Japon est déjà ancienne, dit Farida, en observant toutefois que, jusqu’à une date relativement récente, il n’existait aucune organisation formelle de soutien aux professionnels et aux étudiants de la danse. La situation a changé en 2017 avec la fondation de l’Association japonaise de la danse du ventre. La JBA (d’après le sigle anglais Japan Bellydance Association) organise des séminaires et des ateliers pour ses membres et accueille aussi des spectacles. Farida souligne que l’association, bien qu’elle n’en soit encore qu’à ses débuts, joue un rôle important dans la promotion de la danse du ventre au Japon. L’absence de critères exigeants de recrutement des membres garantit qu’elle est accessible aux danseurs quel que soit leur niveau, et qu’elle ne fait pas entrave aux activités des danseurs et enseignants professionnels en imposant des conditions à l’autorisation d’exercer.

Lorsqu’on lui demande à quoi elle attribue l’essor de la popularité de la danse du ventre au Japon, notamment chez les femmes, Farida répond que le désir d’exprimer leur côté féminin constitue un facteur essentiel de motivation pour nombre de débutantes. Au Japon, les clivages esthétiques entre les hommes et les femmes ont tendance à s’estomper, dit-elle, comme en témoigne la multiplication des magasins de vêtements qui proposent des collections adaptées aux deux sexes. C’est à l’opposé de ce qui se passe dans les pays arabes, où il existe des frontières claires et rigides entre les genres. Les propos des étudiants qui fréquentent son studio de danse l’ont amenée à la conclusion que la danse du ventre attire les femmes qui souhaitent mettre en valeur et renforcer leurs attributs féminins.

Une activité à ne pas sous-estimer !

Elle souligne toutefois que l’apprentissage des mouvements complexes de la danse peut constituer un redoutable défi pour les novices japonaises. Contrairement aux femmes des pays où il existe une tradition de la danse du ventre, dit-elle, les débutantes japonaises, dépourvues de familiarité culturelle avec les mouvements propres à ce style de danse, doivent acquérir la souplesse et le contrôle musculaire indispensables pour exécuter les mouvements giratoires qui le caractérisent.

Le parcours de l’apprentissage est certes abrupt au début, dit-elle avec un sourire rassurant, mais toute personne résolue à aller de l’avant peut surmonter les obstacles initiaux et s’immerger dans le plaisir de la danse du ventre.

Farida, au bout à gauche, donne un cours de danse. (photo de Nippon.com)
Farida, au bout à gauche, donne un cours de danse. (Photo de Nippon.com)

Les bienfaits de la danse du ventre

Farida dit que, outre qu’elle met en valeur la féminité, la danse du ventre est très efficace pour se relaxer. Ses étudiants oscillent entre la trentaine et un âge plus avancé et proviennent d’un vaste éventail d’occupations, qu’elles soient femmes au foyer, employées de bureau, ou exercent une profession médicale ou autre. Beaucoup disent qu’elles aiment la danse parce qu’elle leur offre un moyen agréable d’échapper aux contraintes liées à la carrière ou à la vie à la maison.

La forme physique est un autre attrait. Farida entend souvent ses étudiantes lui demander si la danse du ventre va les aider à perdre du poids, à s’assouplir, ou à devenir plus sexy. Elle ne leur promet rien à cet égard, mais leur garantit que la pratique de la danse est en elle-même gratifiante, même si l’amélioration de la santé ou de la beauté à laquelle on aspirait n’est pas au rendez-vous. Elle déclare en outre qu’un des plus grands avantages de la danse du ventre réside dans son accessibilité et dans le fait qu’on peut l’apprendre à n’importe quel âge. « Il n’est jamais trop tard pour commencer ! », s’exclame-t-elle.

Pour développer son propre style de danse, dit-elle, elle s’est inspirée de personnages légendaires comme Soheir Zaki et Samia Gamal, qui ont enthousiasmé le public des salles de cinéma égyptiennes dans la seconde moitié du XXe siècle. Elle admire aussi le style vocal emblématique de la célèbre vedette de la chanson Oum Kalthoum.

En ce qui concerne l’avenir, Farida déclare que, si une opportunité se présente une fois que la pandémie sera derrière nous, elle est impatiente d’aller exhiber son talent de danseuse outre-mer, que ce soit en Égypte ou à Dubaï, aux Émirats arabes unis.

(Texte et reportage de Nippon.com. Toutes les photos sont avec l’aimable autorisation de Farida Yumi, sauf mentions contraires)

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