Post 11 mars 2011 : les challenges

Quatre ans après le séisme, le Sanriku aujourd’hui (1ère partie)

Société

Le 11 mars 2011, le littoral du Sanriku a été dévasté par le tsunami. Pour cette région déjà mal desservie, sans industrie notoire et minée par le dépeuplement avant même la catastrophe, l’anéantissement a été total. Quatre ans depuis、ne reste aujourd’hui, des zones sinistrées d’où les débris ont été déblayés, que d’immenses terrains vagues et vides. 1ère partie : Rikuzen-Takata, Tarô, Ôtsuchi.

Rikuzen-Takata : des courroies transporteuses dans le ciel

Il y a 4 ans, lorsque j’ai visité la zone urbaine de Rikuzen-Takata durant le mois suivant la catastrophe, j’ai trouvé qu’il y avait quelque chose d’étrange. J’ai eu plusieurs fois l’occasion d’observer les zones sinistrées immédiatement après le désastre, mais là, il y avait quelque chose de différent. C’est en regardant dans mon viseur que j’ai compris : il n’y avait pas de débris.

Toutes les autres zones ravagées par un tsunami sont couvertes jusqu’à perte de vue par les gravats et les débris. Tout le monde a en mémoire un paysage de ce genre comme image de la catastrophe du 11 mars. Mais ici, il n’y avait rien, absolument rien. Bien sûr, les débris n’avaient pas été déblayés. C’est juste que tout, absolument tout, avait été emporté au large par le tsunami. Rien qu’avec ça, se comprend toute l’horreur du tsunami qui a frappé dans cette région (photo 1).

Photo 1 : Rikuzen-Takata, 1er avril 2011

Rikuzen-Takata est l’une des régions du Sanriku qui a connu les plus graves dégâts par le tsunami ayant suivi le grand tremblement de l’Est du Japon. 3 368 maisons ont été détruites, avec 1 976 morts et disparus, soit environ 8% de la population. Je me souviens encore parfaitement aujourd’hui que le soir du 11 mars, un avion de reconnaissance des Forces d’auto-défense annonçait dans son reportage à la télévision : « Rikuzen-Takata, destruction totale ».

Aujourd’hui, à l’endroit où se trouvait autrefois le centre ville de Rikuzen-Takata, des courroies transporteuses sillonnent le ciel (photo 2). Dans le plan de reconstruction, la zone urbaine a été éloignée du littoral et le niveau du sol a été relevé. Les montagnes des alentours ont donc été excavées pour pouvoir remblayer et c’est la terre qui a été extraite que transportent ces courroies. Sur une longueur totale de 3 km. Ce qui permet, paraît-il, de raccourcir la durée des travaux d’un tiers par rapport au transport par camions.

Lorsque je suis allé dans la région l’an dernier, en octobre 2014, les remblais avaient déjà commencé à prendre la forme d’un plateau. Mais, sur le terrain de la ville d’autrefois, il n’y a toujours personne. Il n’y a que les courroies transporteuses qui, seules, continuent leur interminable travail.

Photo 2 : Rikuzen-Takata, 3 octobre 2014

Tarô (ville de Miyako) : la digue anti-tsunami détruite en un instant

Dans le district de Tarô de la ville de Miyako, tout le monde pensait que la digue anti-tsunami pourrait résister.

Cette région a été détruite plusieurs fois par de grands tsunami au cours de son histoire. À l’ère moderne, en 1896, le grand tsunami de Meiji Sanriku emporte avec lui tout le village et coûte la vie à plus de 80% de la population. Le grand tsunami de Shôwa Sanriku de 1933 détruit, quant à lui, environ 90% des habitations et décime environ un tiers de la population.

C’est en 1934, l’année suivant le tsunami de Shôwa Sanriku, que commence la construction d’une immense digue anti-vague. Les travaux sont interrompus pendant la guerre mais reprennent dès la fin des hostilités et, en 1958, un immense mur de 10 mètres de haut par rapport au niveau de la mer est achevé et s’étend sur une longueur totale de 1 350 mètres. Les travaux se poursuivent par la suite pour réaliser un ouvrage d’un gigantisme sans précédent : un double mur en forme de X d’une longueur totale de 2 400 mètres. Tarô est alors fier de se faire connaître comme la région anti-tsunami par excellence.

Mais le tsunami de 2011 balaie d’un seul coup cette belle assurance. La vague a presque 15 mètres de hauteur. Elle détruit en un instant la paroi du côté océan de la double digue sur 500 mètres, puis franchit facilement les autres emplacements du mur. La paroi intérieure du côté des terres est également démolie en grande partie. La zone urbaine est entièrement détruite. Et les victimes seront nombreuses (photo 3).

Aujourd’hui, les travaux de remblaiement se poursuivent à l’intérieur de cette double digue (photos 4 et 5). Mais pour les gens de la région, beaucoup de victimes sont mortes d’avoir fait trop confiance à ce mur gigantesque. Après cette catastrophe, la plupart des rescapés ont accepté de déplacer leur zone d’habitation vers les hauteurs.

District de Tarô, 30 mars 2011

District de Tarô, 22 janvier 2012

Photo 5 : District de Tarô, 4 octobre 2014

Ôtsuchi : un cimetière récupéré pour être finalement enterré

À Ôtsuchi, où le bilan était de presque 1 300 morts et disparus, la reconstruction a été difficile dès le départ. La mairie de la ville a pris le tsunami de plein fouet. Le maire et tous les fonctionnaires du niveau chef de service ont été emportés par la vague. La ville a perdu la totalité de ses fonctions en l’espace d’un instant. Et après la destruction du centre ville par le tsunami, c’est un incendie qui s’est déclaré.

Sur ces photos (photos 6, 7 et 8), on voit un endroit proche des montagnes dans le centre de la ville de Ôtsuchi. Après la maîtrise de l’incendie, le déblayage des gravats n’a pas été facile, parce qu’un grand cimetière se trouvait en dessous. Pour ne pas détruire les pierres tombales, les débris ont été déblayés à la main. L’année suivante, en 2012, le cimetière a pu être récupéré mais, en définitive, comme le terrain a dû être remblayé et son niveau relevé, l’emplacement de la nouvelle ville a été choisi à proximité de la montagne. Et le cimetière a finalement été déplacé. Le remblayage et l’aménagement du terrain de la zone urbaine continuent encore aujourd’hui.

Photo 6 : Ôtsuchi, 19 mars 2011

Photo 7 : Ôtsuchi, 23 janvier 2012

Photo 8 : Ôtsuchi, 4 octobre 2014

(Texte en japonais et photos de Wada Naoki. Photos de titre : zone urbaine de la ville de Kamaishi, 31 mars 2011 [à gauche] / 17 mars 2014 [à droite])

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