Des toilettes 100 % nippones

Les plus anciennes toilettes du Japon

Culture

Revenons sur l’histoire des toilettes japonaises, en visitant les plus anciennes latrines encore en état aujourd’hui dans l’Archipel.

L'histoire des toilettes

Les plus vieux lieux d’aisance du monde auraient été découverts en Irak, sur le site de Tell Asmar, dans les vestiges d’une cité de l’époque akkadienne. Bien que datant d’environ 2 200 ans avant l’ère commune, ces toilettes disposaient déjà d’un système à écoulement d’eau, à siège « assis » en briques.

Au Japon, l’histoire des toilettes remonte au début de la période Jômon, il y a environ 5 500 ans. L’analyse des boues d’un vallon près des ruines de Sannai Maruyama, dans la préfecture d’Aomori, a décelé une densité importante de spores de parasites intestinaux de l’homme. Les archéologues en ont conclu que le lieu avait été destiné aux déjections d’une communauté humaine. Dans la préfecture de Fukui également, près du tumulus de coquillages de Torihama, ont été trouvé de grandes quantités d’excréments humains fossilisés, accumulés aux bords d’un ancien cours d’eau, suggérant que l’endroit était utilisé comme lieu où l’on venait à l’époque délester ses intestins.

Des latrines collectives pour 100 usagers à la fois

Les plus vieilles latrines encore existantes aujourd’hui au Japon se trouvent à Kyoto, dans un lieu beaucoup plus connu pour les admirables feuillages colorés de son parc quand vient l’automne, le Tôfukuji. Au sud du pavillon zen se trouve un bâtiment en bois de 35 mètres sur 14 appelé tôsu. Ce nom désigne typiquement le pavillon des latrines collectives des temples zen.

Vue extérieure du Tôsu du Tofukuji

L’intérieur du bâtiment est aménagé avec une estrade rudimentaire de terre battue percée de nombreux trous régulièrement espacés. Au Tôfukuji, il porte le nom de « Hyaku setchin », qui signifie littéralement « latrines pour 100 personnes à la fois » …

Des trous ronds alignés du « Hyaku setchin »

Le Hyaku setchin, construit durant la période Muromachi (1336-1573) est inscrit sur la liste des patrimoines culturels importants du Japon comme les plus anciennes latrines du pays. Aujourd’hui, il est bien entendu interdit de les utiliser, ni même d’y entrer. Ce n’est qu’après avoir obtenu une autorisation spéciale que j’ai pu les visiter.

Maritomo s’imagine en pratiquant le zen du XIVe siècle accroupie au-dessus du trou !

Les toilettes sont aussi un important lieu de méditation

Les déjections des moines étaient utilisées pour l’enrichissement des sols des champs cultivés à l’intérieur de l’enceinte du temple. Elles étaient également vendues comme fumure aux paysans des alentours pour la culture des légumes qui nourrissaient la capitale à l’époque, représentant ainsi une source de revenus non négligeable pour le temple.

Le tôsu, ou pavillon des latrines, est l’un des « sept bâtiments essentiels » à prévoir et à entretenir pour un temple. Trois de ces bâtiments étaient appelés « pavillons du silence » car il y était interdit d’y bavarder : le pavillon zen, le bâtiment des bains, et les latrines. Dans un temple de l’école zen comme le Tôfukuji, l’endroit où l’on déféquait était donc considéré comme un éminent lieu de méditation.

(Article écrit à l‘origine en japonais. Photos : Maritomo)

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