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De l’éthique politique au sein du Parlement japonais : gros plan sur le « Seirinshin »

Politique

Chacune des deux chambres du parlement japonais possède un Conseil délibératif sur l’Éthique politique, appelé à intervenir lorsqu’un législateur s’adonne à des activités douteuses. Jusqu’à présent, ils ne sont entrés en action qu’à dix reprises, la dernière fois en raison du scandale des sommes dissumulées lors de collectes de fonds au sein du Parti libéral-démocrate, dans lequel est actuellement embourbé le gouvernement. Penchons-nous en détail sur ce Conseil.

Les deux chambres du parlement japonais (la Diète) possèdent des Conseils délibératifs sur l’Éthique politique (Seiji rinri shinsa-kai, abrégé en Seirinshin). La Chambre des représentants (ou Chambre basse) y compte 25 membres et la Chambre des conseillers (ou Chambre haute) 15 membres, sélectionnés tant au sein des formations au pouvoir que dans l’opposition.

Depuis la mise en place de ce système en 1985, les membres ont été appelés à entrer en action à dix reprises pour enquêter sur de possibles cas de non-respect de l’éthique par les membres de la Diète. Les neuf premières fois, la Chambre basse a été convoquée. Le 27 février 2024, le Seirinshin de la Chambre haute s’est réuni pour la première fois afin de demander à 32 membres du Parti libéral-démocrate (PLD, au pouvoir), en exercice ou non, de témoigner sur leur potentielle implication dans le scandale des sommes non déclarées obtenues lors de soirées de collectes de fonds de leur parti. Un accord a par ailleurs été trouvé pour convoquer le Seirinshin de la Chambre basse, en lien avec le même scandale, les 29 février et 1er mars.

Ces Conseils ont pour objectif d’établir les normes éthiques pour les membres du Parlement et de déterminer, au terme de délibérations, si oui ou non ils ont enfreint le code de conduite des députés ou d’autres lois et règlements. Ces organes peuvent émettre des avertissements et recommander des mesures telles qu’interdire de façon temporaire la présence d’un membre. Mais ils n’ont cependant aucun pouvoir formellement défini leur permettant de sanctionner un membre du Parlement.

Les conseils délibératifs peuvent être convoqués sur la base d’une requête formulée par un député au centre d’une polémique, ou à la suite d’une résolution adoptée par des membres de la Chambre. Contrairement à d’autres procédures au Parlement qui peuvent entraîner l’accusation de personnes de mensonges ou de non comparution, les deux Seirinshin n’ont pas le pouvoir de contraindre les personnes visées par des enquêtes à participer. Par ailleurs, aucune sanction n’est appliquée en cas de parjure.

Le Premier ministre Hashimoto Ryûtarô en avril 1998 (©Jiji)
Le Premier ministre Hashimoto Ryûtarô en avril 1998 (©Jiji)

On peut notamment citer l’ancien Premier ministre Hashimoto Ryûtarô qui a comparu devant le Conseil d’éthique de la Chambre basse en lien avec une donation de 100 millions de yens non signalée à la faction du PLD qu’il dirigeait, de la part de la Fédération dentaire japonaise. Il aurait alors accepté cette donation afin d’apaiser l’opinion publique et éviter que l’opposition n’exige de lui qu’il comparaisse sous serment devant le Parlement, s’exposant potentiellement au parjure ou à d’autres chefs d’accusation.

En principe, les conseils ont lieu à huis clos et ne sont pas ouverts aux observateurs extérieurs. Toutefois, si les personnes qui font l’objet d’une enquête sont d’accord, les discussions peuvent être partiellement ouvertes à d’autres membres du Parlement, à la presse écrite ou encore aux caméras de télévision dans le cas de conseils totalement ouverts.

Voici la liste des délibérations des conseils, en date du 28 février 2024 :

Délibérations du Conseil délibératif sur l’Éthique politique

  • 25 septembre 1996
    Katô Kôichi (PLD, Chambre basse), soupçonné d’avoir reçu des dons non déclarés. Séance à huis clos.
  • 5 juin 1998
    Yamasaki Taku (PLD, Chambre basse), en lien avec des dons non déclarés. Session ouverte aux membres de la Chambre basse.
  • 26 février 2001
    Nukaga Fukushirô (PLD, Chambre basse), en lien avec des dons non déclarés. Séance ouverte aux membres de la Chambre basse.
  • 24 juillet 2002
    Tanaka Makiko (non affiliée, Chambre basse), en lien avec le détournement des salaires des secrétaires politiques. Session ouverte.
  • 21 mai 2003
    Matsunami Kenshirô (Nouveau parti conservateur, Chambre basse), en lien avec des connexions présumées avec des bandes criminelles organisées. Séance ouverte.
  • 31 mai 2004
    Harada Yoshiaki (PLD, Chambre basse), en lien avec la falsification des dossiers de ses études à l’étranger. Séance ouverte..
  • 30 novembre 2004
    Hashimoto Ryûtarô (PLD, Chambre basse), en lien avec des dons non déclarés. Session ouverte aux membres de la Chambre basse.
  • 23 février 2006
    Itô Kôsuke (PLD, Chambre basse), en lien avec la falsification de la documentation architecturale concernant la résistance aux tremblements de terre. Séance ouverte.
  • July 17, 2009
    Hatoyama Yukio (Parti démocrate du Japon, Chambre basse), en lien avec la falsification de dossiers de dons politiques. Séance ouverte ; Hatoyama Yukio a choisi de ne pas comparaître devant le Conseil
  • 27 février 2024
    Trente-deux anciens et actuels membres du PLD (Chambre haute), en lien avec des dons politiques partiellement dissimulés. Les délibérations sont en cours et pourraient également avoir lieu dans le cadre du Conseil d’éthique de la Chambre basse.

(Photo de titre : réunion entre Terata Manabu du Parti démocrate constitutionnel du Japon, en haut à gauche, et Kokuta Keiji du Parti communiste japonais, à droite, et d’autres responsables de l’opposition, le 27 février 2024. À l’ordre du jour, les procédures du Conseil délibératif de la Chambre des conseillers sur l’Éthique politique. Jiji)

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