Plongée à la découverte des différentes espèces de thons
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Le thon, bien connu sous le terme japonais de maguro, est un incontournable des restaurants de sushis et de sashimis. Le Japon est le plus gros consommateur de thon au monde, mais certains craignent que d’autres poissons comme le saumon ne menacent sa suprématie. Alors que la consommation de poisson augmente partout sur la planète, elle diminue au contraire sur l’Archipel. Est-ce par la simple force des choses ?
Jusqu’aux années 1980, le Japon était loin devant et détenait le record de la pêche au thon, mais avec la vogue mondiale des sushis, il a été dépassé par Taïwan et les pays d’Asie du Sud-Est, le Mexique et même l’Espagne.

Déchargement de thon rouge du Sud au port de Shimizu, dans la préfecture de Shizuoka. (Avec l’aimable autorisation de Marushin Shôten)
Au Japon, le thon rouge du Nord se vend toujours à des prix élevés et continue de remporter un franc succès auprès des touristes étrangers. Pourtant, le marché du thon s’est grandement diversifié avec l’arrivée du thon rouge du Sud ou du thon obèse, l’éventail s’est élargi aux thons sauvages ou d’élevage, nationaux ou importés, frais ou congelés.
Étonnamment, les consommateurs japonais de maguro connaissent assez mal ce poisson. Ces amateurs consomment « du thon » sans s’intéresser aux caractéristiques de chaque espèce ni aux sites de pêche que nous voudrions détailler ici pour guider les lecteurs dans leur choix.
Thon rouge du Nord : le roi des eaux japonaises

Le thon rouge du Nord peut atteindre les 4 mètres de long et peser plus de 400 kg.
Commençons par l’espèce reine, le thon rouge du Nord, autrement appelé kuro-maguro. Les professionnels du secteur l’appellent aussi parfois hon-maguro, ce qui signifie « vrai maguro », car il est pour eux le thon idéal. Ils parlent également de « diamant noir » en raison de l’éclat noir de ses écailles et des prix élevés qu’il peut atteindre. Toyosu, à Tokyo, est au Japon la mecque du marché du thon, à la première criée de l’année, les prix pour un poisson vendu à l’unité peut atteindre plusieurs centaines de millions de yens.
Le thon rouge du Nord qui atteint des tailles particulièrement importantes, nage dans les eaux les plus froides et donne beaucoup de chair grasse. Comme il vit dans l’océan Pacifique et l’océan Atlantique et migre largement le long des côtes japonaises, le thon pêché au large du littoral, comme le thon d’Ôma, peut être vendu « frais » sur les marchés sans passer par la congélation. Il arrive que ce hon-maguro frais soit vendu à plus de 10 000 yens le kg au marché de Toyosu, même hors période de fin d’année. On le retrouve ensuite à la carte de restaurants de sushis haut de gamme vendu à plusieurs milliers de yens la portion
Cependant, il ne faut pas confondre le label kuro-maguro avec la mention « thon frais pêché en eaux côtières ». Non seulement certains thons rouges sont élevés en fermes aquacoles, mais certains sont également importés congelés de zones de pêche lointaines situées dans le Pacifique ou l’océan Atlantique. Le récent plan mondial des ressources halieutiques a fixé des quotas pour éviter la surpêche, le thon rouge du Pacifique ayant fait l’objet d’une réglementation particulièrement stricte, le tonnage de poisson pouvant être prélevé en eaux côtières est désormais limité.

Sushis de ôma-maguro. Devant à droite, du ôtoro, ou thon gras, derrière à droite, du chûtoro, ou thon moyennement gras et au centre, de l’akami, ou chair maigre. (© Nippon.com)

Ce thon, pêché et débarqué frais dans le principal port de maguro du Japon situé à Katsuura (préfecture de Wakayama), est vendu à la criée à Toyosu. (Avec l’aimable autorisation du marché de Toyosu)
Le thon rouge du Sud : le maguro indien

Le thon rouge du Sud peut atteindre 2 mètres et peser dans les 100 kg.
Le thon rouge du Sud (minami-maguro) est deuxième au palmarès des maguro les plus prisés. Il vit dans les eaux de l’océan Indien ou en hémisphère sud. Au Japon, on l’appelle « maguro indien ». Très apprécié des connaisseurs de Toyosu pour sa chair grasse de grande qualité, appelée « toro », ou sa chair maigre, appelée « akami », il est parfois vendu plus cher que le thon rouge du Nord. À Toyosu on dit que l’akami est plus doux et se marie mieux au riz vinaigré des sushis. Ainsi, si le thon rouge du Nord a encore la faveur des consommateurs, certains chefs de restaurants de sushis montrent une nette préférence pour le thon indien.

Blocs de thon rouge du Sud vendus à prix d’or dans une poissonnerie à la veille des fêtes de fin d’année. (© Pixta)
Les thons pêchés en haute mer par des palangriers sont pour la plupart expédiés congelés aux marchés au poisson. Les bateaux de pêche hauturière qui ciblent le thon rouge du Sud capturent également du thon obèse qui vit sur les mêmes routes de pêche.

Déchargement de thon congelé au port de Shimizu. (© Pixta)
Le thon obèse : le maguro du peuple

Le thon obèse peut atteindre les 2 mètres et dépasser les 120 kg.
Contrairement au thon rouge du Nord ou du Sud, qui sont des espèces haut de gamme, on trouve souvent le thon obèse (mebachi) à la carte des restaurants de sushis à tapis roulant ou au rayon frais des supermarchés. Appelé bigeye tuna en anglais, il a effectivement de grands yeux et se distingue de ses cousins à nageoires bleues par ses nageoires de couleur jaune. Comme il n’existe pas de thon obèse d’élevage, toute la chair qui arrive sur les marchés est issue de la pêche sauvage. D’un beau rouge vif, sa chair maigre est légère en goût mais riche en umami, elle se mange facilement à des prix accessibles.
Pêché sur de vastes zones dans l’océan Atlantique, le Pacifique, ou dans l’océan Indien près de l’équateur, il arrive en grande partie congelé au Japon.

Les offres bon marché des supermarchés sont souvent du thon obèse. (© Pixta)

Thon obèse pêché en Australie. (Avec l’aimable autorisation du marché de Toyosu)
Thon jaune et thon blanc : légers et sains

Le thon jaune est facilement reconnaissable à la couleur de ses nageoires, il peut faire dans les 2 mètres et peser dans les 70-80 kg.
Le thon jaune (kihada) est l’espèce la plus prélevée, au Japon et au niveau mondial. Il tire son nom de la couleur de ses longues nageoires dorsales, ventrales et latérales. Sa chair, riche en protéines, a une saveur délicate et discrète. Son chûtoro est très apprécié en sushi, mais comme il a plutôt une faible teneur en matières grasses, on le retrouve souvent en conserve.

Le thon albacore, aux longues nageoires pectorales, fait un peu plus d’un mètre et pèse généralement dans les 40 kg.
Citons enfin l’albacore, un thon blanc ou thon germon, appelé bin-naga maguro en japonais (où bin-naga désigne habituellement les cheveux poussant sur les tempes) car ses longues nageoires latérales ressemblent à des mèches. Sa chair maigre (akami) et de couleur rose pâle est souvent servie sous le nom de bin-toro dans les chaînes de sushis sur tapis roulant. Au Japon, l’albacore arrive derrière le thon jaune en terme de tonnage et se vend à des prix raisonnables. Il est populaire en sashimi, mais aussi dans les plats mijotés ou en friture. Comme le thon jaune, il finit souvent en conserve.
Mieux comprendre les caractéristiques de chaque espèce fera de vous un expert en maguro et vous profiterez d’autant mieux de ce poisson savoureux.

Sashimi de thon germon, au rose délicat. (© Pixta)
(Photo de titre : dessin permettant de comparer la taille des différentes espèces de thon. © Satô Tadashi)