« Foodpict », des pictogrammes alimentaires à la conquête du monde

Vie quotidienne Design

En un clin d’œil, des informations claires sur la composition des aliments ; bienvenue dans le monde des « foodpict ». Pratiques pour savoir ce que l’on mange, vitales pour ceux qui ont des allergies, ces petites icônes sont faciles à comprendre pour les personnes du monde entier, notamment lors de grands événements comme l’Expo universelle d’Osaka.

Des pictogrammes nés d’une expérience avec un visiteur musulman

Au Japon, les premiers pictogrammes ont vu le jour en 1964, à l’occasion des Jeux olympiques de Tokyo. Rien à voir avec la nourriture à cette époque, ils permettaient d’identifier facilement chaque discipline. Et ils ont su faire leurs preuves puisqu’ils sont rapidement devenus un élément incontournable de la compétition. C’est dans cet esprit que s’inscrivent les « foodpict » ; au nombre de 38 (blé, œufs, sarrasin, crustacés ou noix), ces petites images simplifient la vie à de nombreuses personnes, qui peuvent enfin choisir un plat sur un menu, en sachant ce qu’il contient. Que ce soit en raison d’allergies, de restrictions liées à la religion ou à la santé, ces petites images prennent une grande importance.

Le développeur de la société éponyme à l’origine de ces petites icônes, Foodpict, est basé à Kobe. Le PDG, Kikuchi Nobutaka, n’a pas oublié l’époque où il était étudiant à l’université. En 2005, accompagné d’un visiteur musulman originaire d’Arabie saoudite, il cherchait un restaurant local qui ne servait ni porc ni alcool. Il a cherché et cherché mais en vain. En désespoir de cause, il n’a eu d’autre choix que de se rabattre sur une chaîne fast-food qui proposait des sandwichs au poisson. Une expérience pour le moins embarrassante qui l’a fait réfléchir… Et c’est là l’idée des foodpict lui est venu.

Un design bien réfléchi

En quête d’une vision à l’échelle internationale, le PDG de la société Foodpict a fait appel à un designer en chef de renom. Après de nombreuses discussions avec ce dernier, il en sont arrivés à la conclusion suivante : les pictogrammes devaient être attrayants et avoir l’air appétissants. Des cadres ovales aux formes généreusement arrondies, un arrière-plan jaune pâle comme celui de la crème anglaise et un marron foncé pour les pictogrammes évoquant la couleur du jus de viande. De quoi mettre l’eau à la bouche rien qu’en les observant.

Mais ce n’est pas tout. Quoi de mieux que l’avis des futurs utilisateurs ? Ces pictogrammes devaient aussi être utiles. À l’aide d’images tests, les représentants de la société ont donc mené un sondage auprès de 1 500 personnes, moitié de nationalité japonaise, moitié de nationalité étrangère. Ils ont ainsi amélioré les pictogrammes afin de s’assurer qu’ils étaient non seulement compréhensibles mais aussi visibles.

Le pictogramme le plus problématique était celui des produits laitiers. La première image test représentait un bidon de lait à l’ancienne. Seulement moins de 70 % des personnes de nationalité japonaise pouvaient l’identifier. Si bien que le designer a tout d’abord opté pour, non plus un bidon, mais un berlingot de lait. Cependant, dans certaines régions, les berlingots de lait ne sont pas très répandus ou n’existent tout simplement pas. La société en a pris note et a une nouvelle modifié le pictogramme ; plus de berlingot de lait mais une bouteille, avec un dessin de vache. Résultat : plus de 90 % des personnes interrogées ont pu identifier le pictogramme en tant que produit laitier.

Évolution du pictogramme utilisé pour les produits laitiers. À gauche, premier essai, un bidon de lait et à droite une bouteille avec le dessin de la tête d’une vache. (©︎ ︎Foodpict and NDC Graphics)
Évolution du pictogramme utilisé pour les produits laitiers. À gauche, premier essai, un bidon de lait et à droite une bouteille avec le dessin de la tête d’une vache. (©︎ ︎Foodpict and NDC Graphics)

La présence d’alcool dans les aliments est symbolisée par deux pictogrammes. Les plats japonais utilisant du nihonshu ont été chauffés entraînant une évaporation de l’alcool. Ils sont donc dits « non-alcoolisés ». L’arrière-plan de l’image est blanc pour le différencier de l’alcool dit « actif ».

« Nous avons ressenti le besoin de pictogrammes afin d’aller au-delà des différences entre nations, régions et cultures », explique Kikuchi Nobutaka.

Manger en toute sérénité

En 2010, après une longue période de tâtonnements, l’équipe du PDG de la société Foodpict a développé 14 pictogrammes basés sur les normes JIS et ISO. Ces 14 premiers pictogrammes ont été utilisés en 2019, lors du sommet du G20 à Osaka, où ils ont attiré l’attention d’un grand nombre de personnes à l’échelle internationale. 20 ans plus tard, et après de nouvelles adaptations à des changements tels que l’inclusion de nouveaux allergènes comme les noix de macadamia, 18 nouveaux pictogrammes ont vu le jour. 38 au total.

Les foodpict sont maintenant utilisés dans des aéroports internationaux tels que Narita, Haneda ou Kansai, et dans les hôtels et restaurants qui accueillent de nombreux clients étrangers. Ils ont également fait leur apparition sur des labels alimentaires utilisés par une centaine d’entreprises, dans plus de 1 600 boutiques et magasins.

À l’Expo universelle d’Osaka, on retrouve ces pictogrammes sur les menus et les étiquettes de prix dans plus de 80 lieux et endroits. De nombreux visiteurs du monde entier peuvent ainsi manger dans la gaieté et la sérénité.

Un panneau de différents menus à l’Expo universelle d’Osaka. (Avec l’aimable autorisation de Foodpict)
Un panneau de différents menus à l’Expo universelle d’Osaka. (Avec l’aimable autorisation de Foodpict)

Les boîtes de repas Makunouchi proposées à l'Expo d’Osaka arborent des pictogrammes Foodpict sur leurs étiquettes. (Avec l'aimable autorisation de Foodpict)
Les boîtes de repas Makunouchi proposées à l’Expo d’Osaka arborent des pictogrammes Foodpict sur leurs étiquettes. (Avec l’aimable autorisation de Foodpict)

Kikuchi Nobutaka se réjouit de l’accueil chaleureux reçu par ses pictogrammes. « Tout comme des personnes réunies à une même table partagent dans la joie un bon repas, quelle que soit leur nationalité, leur origine ou leur culture, nous voulons que nos foodpict soient utilisés dans le monde entier, par-delà des frontières de l’Archipel », explique-t-il.

Ces pictogrammes pourraient également être de plus en plus utilisés en cas de catastrophe naturelle. Après le Grand tremblement de terre de l’Est du Japon de 2011, les problèmes de partage d’informations dans des centres d’évacuation, concernant les ingrédients avec des personnes allergiques ou des résidents étrangers ont fourni de précieux renseignements. L’entreprise s’est rapprochée de collectivités et d’administrations locales pour qu’elles aussi puissent diffuser des informations via ces pictogrammes.

(Reportage, texte et photos de Nippon.com. Photo de titre : les 16 pictogrammes alimentaires qui ont servi de base aux 38 qui existent aujourd’hui. © Foodpict et NDC Graphics)

design langue exposition universelle d'Osaka 2025