Championnats du monde d’athlétisme 2025 : présentation des meilleurs espoirs du Japon
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En quête d’une place sur le podium
Du 13 au 21 septembre 2025, Tokyo va héberger les Championnats mondiaux d’athlétisme de cette année. C’est la première fois depuis 1991 que l’événement a lieu dans cette ville, et l’équipe du Japon joue son va-tout en mettant en lice une escouade de 80 athlètes.
Ci-dessous, nous jetons un regard sur une poignée de membres de premier plan de cette équipe participant à la compétition. Les supporters japonais ont la certitude qu’ils auront l’occasion de les applaudir à mesure qu’ils établiront de nouveaux records nationaux — voire mondiaux.
Kitaguchi Haruka (javelot féminin)

Née le 16 mars 1998. Originaire de Hokkaidô. Principales distinctions : médaille d’or aux Jeux olympiques de Paris 2024, médaille d’or aux Championnats mondiaux d’athlétisme 2023, médaille de bronze aux Championnats mondiaux d’athlétisme 2022. (Getty/Kyôdô)
Les sentiments mitigés d’une championne olympique
La lanceuse de javelot Kitaguchi Haruka a dû éprouver un sentiment de déchirement lorsqu’elle a été contrainte de se retirer des championnats nationaux du Japon en juillet 2025. Bien qu’elle fût la personnalité la plus en vue du sport japonais, elle n’a pas eu d’autre choix que le retrait, dû à une douleur dans le coude droit.
Frustrée de ne pas être en mesure de participer à la compétition, Kitaguchi l’a suivie à la télévision et sur Internet, une expérience dont elle avoue qu’elle l’a laissée « bien des fois émue jusqu’aux larmes ». Mais elle l’a aussi aidée à renouveler sa détermination. « Ce fut une réelle source d’inspiration », dit-elle. « Je veux continuer d’aller de l’avant sans perdre courage. »
Kitaguchi est entrée dans l’histoire aux Championnats mondiaux d’athlétisme de 2023, à Budapest, en devenant pour la première fois championne du monde. L’année suivante, à Paris, elle a obtenu la première médaille d’or jamais gagnée par le Japon dans une épreuve d’athlétisme féminin. L’image inoubliable d’elle en train de sonner la cloche de la victoire au Stade olympique fait toujours vibrer les fans. Mais, alors même qu’elle se préparait pour les Championnats du monde de cette année, qui se tenaient au Japon pour la première fois depuis 18 ans, un revers inopportun l’a frappée. Au mois de juin, lors d’une rencontre internationale, elle eut l’impression que quelque chose n’allait pas.
Par la suite, elle a écrit ceci sur son compte X :
« Après avoir participé à la compétition en République tchèque, j’ai senti une gêne dans mon coude droit. Un examen médical effectué juste après mon retour au Japon ayant révélé une inflammation, j’ai décidé de me retirer des Championnats du Japon. »
Le diagnostic établit la présence d’une épicondylite médiale du coude droit, un syndrome qu’on observe aussi chez les golfeurs et les joueurs de tennis, et qui est provoqué par un usage excessif du coude et du poignet qui enflamme la protrusion osseuse à l’intérieur de l’articulation.
Heureusement, sa place était déjà assurée au sein de l’équipe nationale en tant que championne du monde en titre, si bien qu’elle a choisi de privilégier la prudence en renonçant à participer aux Championnats du Japon. Son retour a été fixé à la date du 20 août, à l’occasion de la rencontre de la Ligue de diamant à Lausanne, en Suisse. Mais elle a dû se contenter d’une décevante dixième place, ce qui montrait bien que son chemin vers un rétablissement complet était pavé d’obstacles.
Franchir la barre des 70 mètres
Ce qu’on attend de Kitaguchi ne se limite pas à la défense d’un titre mondial : ses supporters comme ses entraîneurs espèrent la voir franchir la barrière élevée des 70 mètres. Elle a établi son record personnel, 67,38 mètres, lors de la rencontre de la Ligue de diamant qui s’est tenue à Bruxelles en septembre 2023, et ce chiffre reste jusqu’à aujourd’hui le record national du Japon. Le record mondial féminin, 72,28 mètres, a été établi en 2008 par la lanceuse tchèque Barbora Spotàkovà. Seules cinq femmes ont lancé au-delà de 70 mètres depuis l’introduction en 1999 d’une nouvelle spécification pour le javelot, un exploit exigeant des conditions et une exécution quasi parfaites.
Lors de la conférence de presse que l’équipe japonaise a donnée le 7 juillet, Kitaguchi a participé, à la demande des organisateurs, à un rituel de Tanabata (la fête des étoiles) et écrit sur son morceau de papier tanzaku : « Puisse le javelot voler droit ». Les mots n’auraient pas pu être plus simples, presque enfantins. Dans le lancer du javelot, toutefois, c’est la plus brutale de toutes les vérités. Il suffit d’une unique faille dans la forme pour que le javelot ne vole pas comme on le souhaite. Par le biais de sa blessure, Kitaguchi s’efforce de revenir à l’essentiel. C’est là, dans la redécouverte des fondamentaux, qu’elle espère trouver le chemin vers la distance qu’elle recherche.
Kawano Masatora (marche athlétique de 35 kilomètres masculins)

Né le 23 octobre 1998. Originaire de la préfecture de Miyazaki. Principales distinctions : record du monde du 35 km aux Championnats nationaux 2024 du Japon, médaille de bronze aux Championnats du monde 2023 d’athlétisme, médaille d’argent aux Championnats du monde 2022 d’athlétisme, sixième place aux Jeux olympiques de Tokyo 2021. (Kyôdô)
Une force d’envergure mondiale
Dans la marche athlétique japonaise, où des athlètes de haut niveau envahissent le terrain, Kawano Masatora s’est imposé grâce à une performance record au niveau mondial, Les attentes sont élevées quant à la possibilité qu’il gagne sa première médaille d’or.
Kawano porte un souvenir amer. Le 6 août 2021, pendant les Jeux olympiques de Tokyo, il a participé à la marche masculine de 50 kilomètres qui s’est tenue à Sapporo, choisi pour la fraîcheur de son climat. Mais une vague de chaleur imprévue a fait monter la température au-dessus de 30° Celsius avant 9 heures du matin et, aux alentours du kilomètre 41, il s’est effondré sur la route, pris de vomissements apparemment dus à un coup de chaleur. Cela ne l’a pas empêché de serrer les dents et de continuer, pour finir sixième, la plus haute position jamais atteinte par un participant japonais à cette épreuve.
La marche de 50 kilomètres a été interrompue après les Jeux de Tokyo, et remplacée en 2022 par l’épreuve de 35 kilomètres. Les événements de septembre 2025 à Tokyo ne constitueront que la troisième fois où cette distance a fait l’objet d’une compétition aux Championnats du monde d’athlétisme, et Kawano est prêt à relever le défi pour la troisième fois consécutive.
En octobre dernier, lors des Championnats du Japon qui se sont tenus à Takahata, dans la préfecture de Yamagata, il a été chronométré à 2h 21 min 47 s, établissant ainsi le premier record mondial dans cette épreuve (défini par l’organisation Athlétisme mondial comme le premier temps inférieur à 2h 22 min dans le nouveau format de la course). Le temps a également satisfait aux critères de qualification de la fédération japonaise pour les championnats du monde (2h 26 min 00 s). Ces résultats lui ont valu d’être immédiatement intégré dans l’équipe nationale, ce qui entérinait son appartenance à l’élite mondiale des marcheurs athlétiques.
Après avoir établi le record mondial, Kawano s’est dit : « J’ai gagné le droit de participer aux Championnats du monde, mais je ne vois pas cela comme l’objectif final. C’est juste la ligne de départ. Je me suis entraîné à gérer un rythme soutenu, et j’ai pu montrer aujourd’hui les résultats de ce travail. Je suis content que ce vers quoi je tendais a fini par porter ses fruits. »
Mais la barre continue de s’élever. Au mois de mars de cette année, le Canadien Evan Dunfee a battu de sept secondes le record mondial de Kawano. Juste deux mois plus tard, l’Italien Massimo Stano, champion des Jeux olympiques de Tokyo dans la marche de 20 kilomètres, a fait encore baisser le chiffre du record en l’amenant à 2h 20 min 43 s.
Tanaka Nozomi (1 500 et 5 000 mètres féminins)

Née le 4 novembre 1999. Originaire de la préfecture de Hyôgo. Principales distinctions : huitième place aux 5 000 mètres aux Championnats du mone d’athlétisme 2023, huitième place aux 1 500 mètres aux Jeux olympiques de Tokyo 2021. (AFP/Jiji)
Devenue professionnelle il y a deux ans
Peut-être fut-ce le sentiment qu’elle ne pouvait plus rester là où elle était. Toujours est-il que Tanaka Nozomi, fleuron de la course japonaise de demi-fond et de fond, a quitté son équipe d’entreprise chez Toyota Industries et signé un contrat d’engagement avec le fabricant de chaussures New Balance, basé à Boston. C’était une décision cruciale. Si elle voulait entrer en compétition avec les meilleurs athlètes du monde, elle devait s’entraîner dans un environnement international en tant qu’athlète professionnelle.
Tanaka bénéficiait déjà du soutien de New Balance depuis 2019, quand elle était étudiante à l’Université Dôshisha. Le fait de s’entraîner avec l’équipe à l’étranger de l’entreprise l’a poussée à modifier sa situation.
« À mesure qu’augmentait mon expérience de la course sur la scène mondiale, j’ai ressenti un plus fort désir d’aller au-delà de ce que j’avais accompli jusque-là. Je veux m’entraîner avec différentes équipes, en des endroits différents, et construire tout au long de la saison des compétitions un rythme en synchronisme avec celui des meilleurs athlètes du monde. »
Tanaka a stupéfié la nation il y a quatre ans, quand elle a fini huitième aux 1 500 mètres féminins des Jeux olympiques de Tokyo. C’était la première apparition du Japon dans la finale du demi-fond féminin en 93 ans, depuis la médaille d’argent de Hitomi Kinue aux 800 mètres des Jeux d’Amsterdam en 1928. Sa vitesse extraordinaire lui a permis de rester hors de portée de ses concurrentes japonaises.
Son ancienne équipe, celle de Toyota Industries, est l’une des plus fortes dans le monde japonais de l’athlétisme d’entreprise, et pour un athlète impliqué dans la compétition à l’échelle nationale, elle offrait un environnement idéal. Mais Tanaka voulait plus. « Dernièrement, j’ai eu le sentiment de perdre cet appétit parce que je me laissais aller à la mollesse », a-t-elle avoué en annonçant son départ.
Parcourir le monde avec son père/entraîneur
Depuis l’époque où elle était étudiante à l’université, Tanaka a eu pour guide son père, Katsutoshi, lui-même ancien coureur dans une équipe d’entreprise, qui est désormais son entraîneur à plein temps. Tous deux ont parcouru le monde de concert, en s’entraînant dans des endroits comme le Kenya et les États-Unis aux côtés d’athlètes internationaux, tous en quête d’une amélioration de leurs performances de coureurs.
Il s’agissait en permanence d’un processus d’essais et d’erreurs. À Budapest, lors des Championnats du monde 2023, sa première grande rencontre depuis qu’elle était devenue professionnelle, elle est arrivée en huitième position dans la finale de la course de 5 000 mètres, mais a essuyé un échec dans les 1 500 mètres, où elle a été éliminée en demi-finale. Aux Jeux olympiques de Paris de l’an dernier, elle a raté la finale des deux épreuves, ce qui a renforcé sa détermination à faire un score aux Championnats du monde de Tokyo.
« À Paris, le soutien de la foule aux coureurs français était incroyable. C’était comme un grondement sous vos pieds, qui vous poussait en avant », s’est-elle souvenue lors d’une conférence de presse qu’elle a donnée après avoir acquis la certitude de son intégration au sein de l’équipe nationale japonaise. « Ce genre d’énergie vous donne de l’élan. Je pense donc que l’opportunité de courir devant un Stade national plein à craquer ici à Tokyo peut constituer un réel avantage. » Épaulée par le soutien de ses compatriotes, Tanaka espère faire de ce championnat une étape décisive pour sa percée.
Kiryû Yoshihide (100 mètres et relais quatre fois 100 mètres masculins)

Né le 15 décembre 1995. Originaire de la préfecture de Shiga. Principales distinctions : médaille d’argent au relais quatre fois 100 mètres des Championnats du monde 2019, médaille de bronze au relais quatre fois 100 mètres des Championnats du monde 2017, médaille d’argent au relais quatre fois 100 mètres des Jeux olympiques de Rio 2016. (Jiji)
Redécouvrir la sensation d’un retour en force
Il avait l’impression de sortir d’un long tunnel obscur. Le chronomètre indiquait 9,99 secondes. Le 3 août 2025, lors de l’Épreuve mondiale Fuji Hokuroku qui se déroulait dans la préfecture de Yamanashi, Kiryû a franchi pour la première fois en huit ans la barrière des 10 secondes. L’homme qui, en 2017, est devenu le premier sprinteur japonais à passer sous la barre des 10 secondes, avec un chiffre de 9,98 secondes, venait enfin de montrer qu’il était de retour.
Kiryû a représenté le Japon aux 100 mètres en 2016 aux Jeux olympiques de Rio, où il a aussi contribué à l’obtention d’une médaille s’argent au relais quatre fois 100 mètres. Mais il n’a réussi à se qualifier pour l’épreuve individuelle ni aux Jeux de Tokyo en 2021 ni à ceux de Paris en 2024 et, bien que sélectionné en tant que participant au relais, il n’a pas réussi à monter sur le podium. Ces dernières années, sa présence sur la scène japonaise du sprint a semblé s’estomper.
Entre-temps, le 100 mètres masculin au Japon est devenu l’objet d’une compétition acharnée. Une vague de nouveaux talents a émergé, notamment en juillet 2025, quand Shimizu Sorato, âgé de 16 ans, élève au lycée Seiryô d’Ishikawa, a battu le record national des établissements solaires détenu de longue date par Kiryû. Ses 10,00 secondes ont également établi un nouveau record mondial pour les athlètes de moins de 18 ans, comme l’a reconnu la fédération World Athletics.
Kiryû, toutefois, était aux prises avec ses propres difficultés personnelles. Après les Jeux olympiques de Tokyo, il a révélé qu’il souffrait de colite ulcéreuse, une maladie qualifiée d’incurable par les autorités, depuis sa deuxième année à l’université. Cette annonce a été suivie d’une pause de trois mois dans la compétition. Les médecins lui ont dit que le stress était le principal facteur du déclenchement de la maladie. L’implacable pression avait non seulement pesé sur son esprit mais aussi mis son corps à rude épreuve.
Un coup de pouce grâce aux super spikes
Après des années de difficultés, Kiryû a reconquis le titre du 100 mètres masculin aux championnats du Japon du mois de juillet, son premier titre national en cinq ans. Depuis l’automne dernier, il court en « super spikes », les chaussures à semelles épaisses devenues la norme au sein de l’élite mondiale, et les progrès de son adaptation à ces chaussures ont joué un rôle essentiel dans son retour en force. En franchissant la ligne d’arrivée, il pleurait sans se cacher. « Je fais de l’athlétisme depuis le collège, il y a maintenant plus de dix ans de cela », avoue-t-il. « Mais c’était la première fois que je versais des larmes de joie. »
Avec ces percées successives, d’abord le titre national puis un chiffre inférieur à 10 au Fuji Hokuroku World Trial, Kiryû a reconsidéré sa carrière dans une nouvelle perspective. « Chaque année a été intense. Il y a eu des moments où je devais m’entraîner d’une certaine façon, ou réfléchir à ce qui devait changer. Cela a duré huit ans. Si je devais me retirer un jour, je sais que ces années sans temps rapides resteraient une partie essentielle de moi-même, une valeur sûre. »
Kiryû aura 30 ans au mois de décembre. Après avoir essuyé des revers et retrouvé la forme, le sprinteur chevronné atteint aujourd’hui un nouveau sommet. Le Japon gardera les yeux fixés sur ses performances aux Championnats du monde de Tokyo.
Autres stars potentielles
Le Japon envoie une équipe de 80 athlètes aux Championnats du monde d’athlétisme de cette année. Nous vous présentons ci-dessous quelques autres membres de cette équipe qui sont sous les feux de la rampe à l’approche de la compétition.
Miura Ryûji (3 000 mètres steeple masculins)

Né le 11 février 2002. Originaire de la préfecture de Shimane. Principales distinctions : record national (8:03.43), meeting Herculis à Monaco 2025 (troisième meilleur résultat de la saison 2025), huitième place aux Jeux olympiques de Paris 2024, sixième place aux Championnats du monde d’athlétisme 2023, septième place aux Jeux olympiques de Tokyo 2021. (Reuters)
Yamanishi Toshikazu (marche athlétique de 20 kilomètres masculins)

Né le 15 février 1996. Originaire de la préfecture de Kyoto. Principales distinctions : record du monde (1h16min10s) aux championnats nationaux du Japon 2025, médaille d’or aux championnats du monde d’athlétisme 2022, médaille de bronze aux Jeux olympiques de Tokyo 2021, médaille d’or aux championnats du monde d’athlétisme 2019. (Guillermo Martinez/Reuters)
Muratake Rachid (110 mètres haies masculins)

Né le 6 février 2002. Originaire de la préfecture de Chiba. Principales distinctions : record national (12.92), Athlete Night Games 2025 à Fukui (deuxième meilleur résultat de la saison) ; cinquième place aux Jeux olympiques de Paris 2024. (Reuters)
(Photo de titre : à partir de la gauche, Kitaguchi Haruka [Getty/Kyôdô], Kawano Masatora [Kyôdô], Tanaka Nozomi [AFP/Jiji], and Kiryū Yoshihide [Jiji])