Du bon riz !

Le bon riz préserve les belles rizières en terrasse

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Le riz « Tosa tenku no sato Nikomaru », cultivé dans des rizières en terrasses de la région montagneuse de la préfecture de Kôchi, a créé la surprise en obtenant le Premier Prix au « Concours du meilleur riz japonais » en 2010. Ce n’était pourtant pas nationalement connu. Nous avons donc rendu visite aux producteurs du meilleur riz du Japon.

Le meilleur riz du Japon est originaire de la petite ville de Motoyama, dans la la préfecture de Kôchi, au cœur de l’île de Shikoku. La région est bordée au nord par les monts Ishizuchi et au sud par les monts Tsurugi. On y accède en une heure de route environ par l’autoroute depuis la ville de Kôchi. C’est une ville de montagne aux ressources en eau abondantes, située à proximité de la source de la rivière Yoshino. On suit une voie forestière étroite à partir de la nationale 439, et en cinq minutes, la vue se dégage soudain : des rizières en terrasse couvrent les flancs des montagnes du pied jusqu’au sommet, remplies de lourds épis de riz mûr, qui n’attendent plus que la moisson.


Les rizières en terrasses de Motoyama s’étendent de 250m à 850m d’altitude, créant un paysage d’une beauté qui ne semble pas de ce monde. C’est le bien nommé « Pays céleste » de l’ancienne région de Tosa.

Le riz « Tosa Tenkû no sato Nikomaru », une merveilleuse surprise

Le résultat du Concours du meilleur riz japonais 2010 a été une énorme surprise. Pour la première fois, ce prix est allé à des producteurs de l’ouest du Japon, pour leur variété « Tosa Tenkû no sato Nikomaru » ; c’était aussi la première fois que le prix couronnait une variété autre que le célèbre Koshihikari. Le Tosa Tenkû no sato Nikomaru (« Le Nikomaru du pays céleste de Tosa ») a été mis sur le marché pour la première fois en 2009, c’est donc encore une toute jeune marque. Le Nikomaru répondait en outre à un désir de créer une variété mieux adaptée à la culture dans les régions tempérées, plus que pour son goût. Ce fut donc une merveilleuse surprise pour tous les gens impliqués dans son développement.

Des ruisseaux coulent à proximité des terrasses des rizières. Ils irriguent les terrasses avant de s’écouler vers la rivière Yoshino.

M. Wada Kôichi, sous-directeur de la régie agricole de Motoyama, à l’origine de la création du label, a poussé des cris de joie à l’annonce du résultat : « Depuis cette couronne, nous avons énormément de commandes, nous avons même du mal à faire suivre la production pour y répondre ».

M. Wada explique que si « Tosa Tenkû no sato » est une jeune marque, elle n’est que le résultat d’une très longue tradition de riziculture de haute qualité.

« Nous possédons des documents qui prouvent l’existence de la riziculture dans notre région depuis l’ère Jômon. À l’époque des royaumes combattants, le clan Motoyama, qui gouvernait l’endroit, a fait développé des rizières pour assurer l’alimentation de la population, ce dont les terrasses actuelles portent encore la trace. Le sol argileux est tout à fait propice à la culture du riz, et donne un riz de bonne qualité. On dit généralement que la riziculture en altitude pose un problème d’irrigation. Mais dans notre région, nous avons un bon nombre de sources, ce qui résout le souci. Au contraire, l’altitude permet de bénéficier d’importantes variations de température. Le riz gagne en vitalité par un heureux dosage de chaud et de froid. »

Pour maintenir les rizières en terrasse du pays

Néanmoins, face au vieillissement de la communauté locale, de plus en plus de familles arrêtaient le travail agricole, du fait de la mécanisation difficile de la riziculture en terrasse. Afin de maintenir la tradition de la riziculture dans la région, certains producteurs trentenaires ou quarantenaires ont alors pris la résolution de s’engager dans le projet de créer un label pour le riz local, en tirant parti des qualités de l’eau et du sol de la région. Ils adoptèrent ainsi deux variétés : « Hinohikari », assez bien diffusé dans l’ouest du Japon, et « Nikomaru », bien adapté au climat doux.

« En introduisant des variétés de riz ordinaires, qui n’avaient pas été développées pour leurs qualités gustatives, nous voulions surtout mettre l’accent sur la qualité de notre environnement et la spécificité de notre méthode de production à Motoyama », dit à ce propos M. Wada.

Ils sont restés intraitables sur les moindres détails du mode de culture. Tous les producteurs parties au projet ont obtenu la certification d’agriculture biologique « eco farmer » délivré par la la préfecture de Kôchi et ont mis en commun toutes leurs informations et le niveau d’utilisation des insecticides agricoles et les engrais. Les vétérans ont généreusement transmis la totalité de leur expérience aux jeunes.

Concernant la mise en marché, ils se sont fixés des critères très sévères concernant la taille des grains et la couleur. Généralement, la récolte est passée au tamis de 1,8 mm, mais pour le Tosa tenkû no sato c’est un tamis de 1,9 mm qui est utilisé. Seuls les gros grains sont déclarés propres à la vente. Les producteurs se sont en outre rendus eux-mêmes dans les foires-expositions de façon à écouter la voix des consommateurs et adapter leurs critères de production en fonction.

M. Ôishi Naoya, l’un des producteurs impliqués dans le développement du label Tosa tenkû no sato aux côtés de M. Wada, nous explique : « Ce paysage de rizières en terrasse, c’est notre pays natal. Nous désirons le conserver. Pour cela, il fallait que nous puissions vivre de l’agriculture. Nous avons réunis tous les jeunes producteurs encore en activité dans la commune pour créer le Tosa tenkû no sato. On entendait dire que le riz du Shikoku ne se vendrait jamais, mais nous avons tout misé sur les qualités de notre terroir. Quand un consommateur, sur une exposition dans un grand magasin, a goûté et a dit : “C’est délicieux”, j’étais vraiment heureux. »

Quand le riziculteur a confiance en lui, le goût suit.

À l’automne 2011, le riz du nouveau label en est à sa troisième moisson. Le nombre des producteurs participants est passé de vingt à quarante.

« Quand notre riz a été jugé le meilleur du Japon, cela m’a donné confiance en moi », dit Mme Hosokawa Fuyuko avec un sourire, tout en coupant une gerbe à la faucille.

Son mari, M. Hosokawa Kazuho, travaille pour une société d’autobus régionale. Ses jours de congés, il manie le motoculteur. Sa femme récolte le reste à la main. Leur chien Kuro les accompagne.

 « Le motoculteur permet de moissonner dans les terrasses, mais près des bordures ou les pointes, il faut le faire à la main avec la faucille. C’est une faucille à dents fines, ça ne demande pas beaucoup de force pour couper. »

Mme Sawada Tomoko met le riz coupé en gerbes. « Nous, nous élevons des vaches à viande aussi. La paille nous sert pour leur pâture. Je mets en gerbe et je les couvre pendant qu’il fait jour, pour les protéger. À propos, vous savez, le « Bœuf rouge de Tosa » de Motoyama est un vrai délice aussi ! Une viande bien rouge, pas veinée de blanc, très goûteuse. Notre riz est le numéro 1 du Japon, j’espère que la viande aussi va avoir du succès. »


Rizières en terrasses sous la brume matinale. La brume est épaisse le matin, les épis de riz ont la goutte. La moisson se fait en fin d’après-midi, quand le brouillard s’est dissipé.

M. Taoka Kiyoshi est le producteur du « Nikomaru » qui a obtenu le prix l’année dernière (2010).

« Dans d’autres régions, d’abord ils coupent l’épi, puis ils le font sécher. Nous, à Motoyama, nous le laissons mûrir sur pied jusqu’à ce que les feuilles soient jaunes. C’est ça, le secret du goût du « Tosa tenkû no sato ». J’ai un peu de souci pour cette fois, le mûrissement a été retardé à cause du typhon qui est passé en septembre. Mais on peut dire que c’est exactement la spécificité de « Tosa tenku no sato » : sa récolte peut varier selon le climat, et le goût aussi. »

Ce sont l’environnement de la région et la passion des producteurs qui ont fait le goût du « Tosa tenkû no sato ».

Photos : Ôhashi Hiroshi

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