Les milles et une merveilles de Kyoto

L’hiver à Kyoto, entre fêtes de fin d’année et cérémonies traditionnelles

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Kyoto, ses temples, ses sanctuaires et ses vieilles ruelles. De nombreuses cérémonies traditionnelles sont organisées dans cette ancienne capitale du Japon tout au long de l’année, mais la période des fêtes de fin d’année est particulièrement riche en manifestations. Tour d’horizon de ces traditions séculaires qui accompagnent l’arrivée de l’hiver.

Les fêtes de fin d’année à Kyoto

« Koto hajime » à Gion

Chaque année, le 13 décembre, les geishas et leurs apprenties maiko de Gion (arrondissement de Higashiyama) font à pied le tour des maîtres dans les arts qu’elles pratiquent et des salons de thés et autres établissements qu’elles fréquentent au quotidien, afin de présenter à chacun leurs remerciements pour l’année écoulée. C’est le « koto hajime ». Les geishas saluent chacun d’un « okotôsan dosu », une expression qui signifie qu’elles se réjouissent de la bonne marche des affaires de leur interlocuteur.

Ce jour marque le début des préparatifs des festivités du jour de l’An dans le quartier des geishas, avec en particulier la distribution de kagami-mochi (une décoration composée de deux galettes de riz pilé) aux personnes que l’on souhaite remercier. Pour les habitants de Kyoto, le ballet des geishas en kimono dans les rues annonce avant tout la fin de l’année. Aujourd’hui, un nombre croissant d’amateurs se rassemblent à Gion à cette date, appareil photo à la main, pour immortaliser la scène.

Des geishas de Gion en route pour le « koto hajime ». Pour cette occasion, elles portent souvent des tenues coordonnées
Des geishas de Gion en route pour le « koto hajime ». Pour cette occasion, elles portent souvent des tenues coordonnées.

Derniers marchés au temple Tôji et au sanctuaire Kitano-Tenmangû

Le temple Tôji (arrondissement de Minami) est, avec le monastère du mont Kôya à Wakayama et le temple Zentsû-ji à Kagawa, l’un des trois grands lieux mémoriels de Kôbô-daishi (également connu sous le nom de Kûkai), le fondateur de l’école bouddhique Shingon. Le 21 de chaque mois, date anniversaire de son décès, se tient un marché d’objets d’art et d’artisanat anciens dans l’enceinte du temple, le « Kôbô-ichi » ; le dernier de l’année – baptisé « shimai Kôbô » –, le 21 décembre, attire une foule sans précédent. Devant la pagode à cinq étages, plus d’un millier d’étals proposent des antiquités, des objets décoratifs pour le jour de l’An, des kakis séchés et des mets à grignoter, comme des boulettes frites au poulpe.

La foule se presse au marché « shimai kôbô » du temple Tôji
La foule se presse au marché « shimai kôbô » du temple Tôji

Le sanctuaire Kitano-Tenmangû (arrondissement de Kamigyô), consacré à Sugawara no Michizane, la divinité des études, accueille chaque 25 du mois le marché « Tenjin », du surnom de Sugawara. Ici aussi, le 25 décembre, le dernier marché de l’année, baptisé « shimai Tenjin », rencontre un grand succès. On y trouve des décorations du jour de l’An et des plantes, mais l’enceinte du sanctuaire accueille également des spectacles de singes et autres qui font rire le public aux éclats. Des prunes séchées ôfuku-ume préparées au sanctuaire, censées apporter le bonheur, sont vendues du 13 au 25 décembre environ (700 yens le sachet).

« Shimai tenjin » au sanctuaire Kitano-Tenmangû
« Shimai Tenjin » au sanctuaire Kitano-Tenmangû

Des fidèles achètent des décorations pour le Nouvel An
Des fidèles achètent des décorations pour le Nouvel An.

« Osusu-harai » aux temples Higashi Hongan-ji et Nishi Hongan-ji

Le 20 décembre, tous les ans, le grand ménage osusu-harai débute vers 7 heures du matin au temple Nishi Hongan-ji et vers 9 heures au temple Higashi Hongan-ji (tous deux situés dans l’arrondissement de Shimogyô). Cette cérémonie, qui consiste à ôter la poussière accumulée pendant un an dans le bâtiment principal, existerait depuis l’époque de Muromachi (1336-1573). Les foyers japonais ont coutume de faire leur « grand ménage de printemps »... à chaque fin d’année !

Des femmes frappent les tatamis du temple Nishi-Honganji avec des bâtons en bambou
Des femmes frappent les tatamis du temple Nishi Hongan-ji avec des bâtons en bambou.

Le plus grand éventail utilisé lors de la cérémonie osusuharai au Nishi-Hongan-ji
Le plus grand éventail utilisé lors de la cérémonie osusu-harai au Nishi Hongan-ji.

Des fidèles frappent les tatamis à coups de bâtons en bambou qui produisent un claquement sec, tandis que d’autres, avec de grands éventails, chassent vers l’extérieur la poussière ainsi soulevée. Cette cérémonie traditionnelle est également une façon d’exprimer sa joie d’avoir passé une année sans encombre.

La cérémonie osusu-harai au temple Higashi-Hongan-ji
La cérémonie osusu-harai au temple Higashi Hongan-ji

Coups de cloche au temple Chion-in

Au Chion-in (arrondissement de Higashiyama), temple principal de l’école bouddhique Jôdo-shû (école de la Terre pure), la cloche que viendront frapper 108 fois les fidèles pour fêter le passage à la nouvelle année est testée le 27 décembre. L’imposante cloche du temple, l’une des plus grosses du Japon, est désignée patrimoine national important. Avec ses 3,3 mètres de haut et un diamètre d’environ 2,8 mètres, elle pèse autour de 70 tonnes, ce qui en fait l’une des trois plus grandes cloches de temples du pays, aux côtés de celles du Tôdai-ji et du Hôkô-ji.

La cloche du temple est testée le 27 décembre.
La cloche du temple est testée le 27 décembre.

Elle est frappée par 17 moines en même temps, dont l’un tient la corde principale et les seize autres les cordes secondaires. Celui qui tient la corde principale donne le signal en criant « eeei, hitotsu ! » (ehh, un !), cri répété par ses compagnons puis, au cri de « sooore ! » (allez !), ils s’arc-boutent pour tirer la poutre qui ira frapper contre la cloche.

Dix-sept moines frappent la cloche.
Dix-sept moines frappent la cloche.

Cérémonies du Nouvel An à Kyoto

La cérémonie du premier jeu de cartes au sanctuaire Yasaka

Le 3 janvier est organisée au sanctuaire Yasaka (arrondissement de Higashiyama) la cérémonie du premier jeu de cartes de l’année, en l’honneur de Susanoo-no-mikoto, le dieu des tempêtes révéré ici et considéré comme le premier poète de la forme waka. Sur la scène de théâtre nô du sanctuaire, des femmes et des enfants vêtus comme à l’époque de Heian jouent au jeu de cartes à assembler Hyakunin isshu (« De cent poètes un poème »). La technique de compétition consistant, quand on trouve la carte cherchée, à la faire voler d’un revers de la main, étant interdite, le spectacle des participants posant délicatement leur main sur la carte convoitée respire l’élégance.

La cérémonie du premier jeu de cartes de l’année, pleine de grâce et d’élégance.
La cérémonie du premier jeu de cartes de l’année, pleine de grâce et d’élégance.

La bouillie de riz aux sept herbes sauvages du sanctuaire Gokônomiya

Déguster un bol de bouillie de riz aux sept herbes sauvages (nanakusa-gayu) dans un sanctuaire est l’un des premiers plaisirs de l’année à Kyoto. Le premier bol est offert aux divinités pour s’assurer une année en bonne santé, après quoi la soupe est distribuée aux fidèles.

Distribution de soupe de riz aux sept herbes sauvages au sanctuaire Gokônomiya.
Distribution de bouillie de riz aux sept herbes sauvages (nanakusa-gayu) au sanctuaire Gokônomiya.

Le sanctuaire Gokônomiya (arrondissement de Fushimi) était autrefois appelé Mimoro. C’est l’empereur Seiwa qui, en 862, l’aurait rebaptisé « sanctuaire des senteurs » après qu’une source odorante dont l’eau guérissait immédiatement les malades avait jailli dans son enceinte. Cette eau de source est la seule de la ville de Kyoto à avoir été choisie, en 1985, par l’agence de l’environnement parmi les Cent plus belles sources du Japon. Au sanctuaire Gokônomiya, moyennant un don de 300 yens, les fidèles désireux de se prémunir contre les maladies peuvent déguster un bol de bouillie de riz préparée avec cette eau de source qui rencontre un franc succès.

Les sept herbes sauvages sont le céleri d’eau, la bourse-à-pasteur, le gnaphale, la stellaire, le lamier, le navet et le radis daikon
Les sept herbes sauvages sont le céleri d’eau, la bourse-à-pasteur, le gnaphale, la stellaire, le lamier, le navet et le radis blanc daikon.

« Hatsu Ebisu » au sanctuaire Ebisu de Kyoto

Du 8 au 12 janvier, durant cinq jours, le sanctuaire Ebisu de Kyoto (arrondissement de Higashiyama) est le théâtre de cérémonies pour s’assurer une année productive, autour du jour du « Hatsu Ebisu » le 10 janvier. Ebisu est en effet le dieu de la prospérité.

L’offrande de feuilles de bambou pour demander prospérité à la maison et dans les affaires est la principale cérémonie organisée à cette période, mais on voit également des acteurs des studios Tôei de Kyoto arriver en chaise à porteurs traditionnelle pour une prière, et c’est également ici que la fédération des pêcheurs de Kyoto vient faire offrande d’un thon. Les nombreux étals aux abords du sanctuaire sont fréquentés par une foule de fidèles venus prier pour une année prospère.

Devant un chaudron d’eau bouillante, une prêtresse prie pour la bonne santé des fidèles.
Devant un chaudron d’eau bouillante, une prêtresse prie pour la bonne santé des fidèles.

Les 8 et 9 janvier, les acteurs des studios Tôei de Kyoto viennent en chaise à porteurs traditionnelle.
Les 8 et 9 janvier, les acteurs des studios Tôei de Kyoto viennent en chaise à porteurs traditionnelle.

Tir à l’arc des jeunes adultes au temple Sanjûsangen-dô

Cette cérémonie puise ses sources dans un concours de tir à l’arc de l’époque de Kamakura (1185-1333) au cours duquel des samouraïs s’affrontaient durant 24 heures pour savoir qui tirerait le plus de flèches sous l’auvent du temple Sanjûsangen-dô long de 120 mètres. Le lieu est également célèbre pour ses 1 001 statues bouddhiques.

C’est ainsi que le dimanche le plus proche du 15 janvier, quelque 2 000 participants, parmi lesquels les meilleurs tireurs à l’arc du pays et des jeunes gens fêtant leurs vingt ans (année du passage à l’âge adulte) se rassemblent pour un tournoi de tir à l’arc baptisé ômato. Ils doivent atteindre une cible d’environ un mètre de diamètre située à une soixantaine de mètres de distance. Cette cérémonie magnifique au cours de laquelle des jeunes gens en kimono pratiquent le tir à l’arc japonais est réputée dans tout l’archipel.

Des jeunes filles, vêtues d’un hakama en forme de jupe-culotte par-dessus leur kimono, tirent à l’arc.
Des jeunes filles, vêtues d’un hakama en forme de jupe-culotte par-dessus leur kimono, tirent à l’arc.

(Reportage et texte : Fujii Kazuyuki, de 96BOX. Photos : Kuroiwa Masakazu et Fujii Kazuyuki, de 96BOX. Photo de titre : le rituel du osusu-harai du temple Nishi Hongan-ji)

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