Exploration de l’histoire japonaise

150 ans depuis l’ouverture du chemin de fer au Japon : la volonté de rivaliser avec les puissances occidentales

Histoire Technologie

La première ligne ferroviaire du Japon a été ouverte entre Shimbashi et Yokohama le 14 octobre 1872, il y a 150 ans. La naissance des chemins de fer nationaux s’explique par la ferme intention de l’État de mettre en avant la richesse nationale et la puissance militaire, de favoriser l’industrialisation et le développement, dans l’objectif de parler d’égal à égal avec les puissances occidentales.

Le Commodore Perry fait rouler le premier train à vapeur du Japon

En juin 1853, l’escadron américain des Indes orientales dirigé par le commodore Matthew Perry arrive au Japon, jusque-là fermé au reste du monde, et exige l’ouverture du pays. L’année suivante, en mars 1854, Perry revient. Cédant à la pression américaine, le shogunat conclut le traité d’amitié entre le Japon et les États-Unis.

Les Japonais sont tout d’abord saisis d’horreur devant les vaisseaux noirs, des navires à vapeur et leurs tirs de semonce, mais lors de sa deuxième visite au Japon, Perry offre au shogunat un modèle réduit d’une locomotive à vapeur. (Voir notre article : Le train miniature offert par les Américains qui a poussé le Japon à se moderniser)

Perry était accompagné d’un ingénieur ferroviaire. Celui-ci fit poser 100 m de rails circulaires le long de la côte à Yokohama, et a réellement utilisé du charbon pour faire fonctionner la locomotive. Kawada Hachinosuke, un fonctionnaire du shogunat, fut impressionné par la vitesse de la locomotive (32 Km/h) et déclara qu’elle « volait littéralement et était extrêmement confortable ». Perry a également offert des armes et des équipements télégraphiques de fabrication américaine pour montrer au shogunat à quel point la civilisation occidentale était avancée.

Le commodore Perry, de la Marine des États-Unis, qui a poussé le Japon a s'ouvrir au commerce international. (AFP/Jiji)
Le commodore Perry, de la Marine des États-Unis, qui a poussé le Japon a s’ouvrir au commerce international. (AFP/Jiji)

L’année suivante, le clan Saga construisit sur place un modèle de locomotive à vapeur et réussit à la faire fonctionner.

En août 1853, soit un mois à peine après la première visite de Perry, un officier de marine de l’Empire russe, Levfimy Poutiatine, avait débarqué à Nagasaki et avait demandé l’ouverture du pays au shogunat. Il avait autorisé le public à visiter son bateau, où se trouvait exposé une machine à vapeur. Nabeshima Naomasa, seigneur de Saga, décida la fondation d’un institut scientifique, où des ingénieurs de talent furent invités à étudier et à fabriquer des armes et machines occidentales, canon et fours à réverbère. Ce sont les ingénieurs du Seirenkata (du nom de l’institut en question) qui construisirent la machine à vapeur de Saga, à partir de leur étude de la machine de Poutiatine et d’ouvrages théoriques de référence.

Il est donc faux de dire que le Japon resta longtemps à la traîne de la civilisation mondiale en raison de son isolement : les Japonais de l’époque étaient suffisamment compétents pour reproduire rapidement les machines occidentales.

Tanaka Hisashige dirigea la production. Originairement fabricant d’automates natif de Kurume (Fukuoka), connu sous le nom de « Karakuri Giuemon » (« Giuemon des Automates »), il a fabriqué d’excellents produits à Osaka et Kyoto, notamment des lampes à huile capables de s’auto-approvisionner quand l’huile vient à manquer dans le réservoir, et de grandes horloges à ressorts. Le seigneur Nabeshima appréciait beaucoup le talent de Tanaka et le promut au rang de samouraï du clan. Il le fit travailler à la recherche et au développement de moteurs à vapeur en tant que membre-clef du Seirenkata. Tanaka est ensuite devenu le fondateur de Shibaura Seisakusho (d’où est issu le groupe Tôshiba).

Automate calligraphe. Œuvre de la fin de l'époque d'Edo réalisée par Tanaka Hisashige, qui utilisait un dispositif à ressort pour écrire des caractères sur du papier japonais en appliquant de l'encre sur un pinceau. (Jiji)
Automate calligraphe. Œuvre de la fin de l’époque d’Edo réalisée par Tanaka Hisashige, qui utilisait un dispositif à ressort pour écrire des caractères sur du papier japonais en appliquant de l’encre sur un pinceau. (Jiji)

Le savoir-faire britannique au service du chemin de fer nippon

Cependant, ce n’est pas avant l’ère Meiji (1868-1912) qu’un chemin de fer à grande échelle put être construit au Japon. En janvier 1868, la demande d’Anton Portman, membre de la légation américaine, la construction d’un chemin de fer entre Edo (aujourd’hui Tokyo) et Yokohama est finalement approuvée par Ogasawara Nagamichi, un haut fonctionnaire shogunal. Selon la demande, les travaux de pose et les droits de gestion devaient être entièrement laissés à la charge de la partie américaine.

Trois mois plus tard, cependant, le shogunat se rend sans condition aux nouvelles forces impériales. Le nouveau gouvernement rompt le contrat avec Portman, et, sur les conseils du ministre britannique Harry Parkes, décide de gérer lui-même le chemin de fer, avec l’aide des Britanniques.

La construction du premier chemin de fer du Japon fut donc entreprise sous la direction de Ôkuma Shigenobu, vice-ministre des Affaires civiles et des Finances.

Ôkuma était issu du clan Saga et a sans doute vu les locomotives à vapeur construites par le clan. Il est du moins significatif qu’il a grandi dans un contexte qui éprouvait du respect pour la technologie occidentale. Afin de moderniser le Japon et de l’amener au niveau des puissances occidentales, le pays doit s’enrichir au plus vite. Pour y parvenir, le développement d’un système de transport était une nécessité urgente. Telle était l’idée qui animait ces hommes. Ôkuma passe outre les oppositions qui insistent pour que les navires de guerre soient prioritaires par rapport aux chemins de fer, et la construction du chemin de fer est réalisée.

La construction proprement dite a été dirigée par Edmund Morel, un ingénieur ferroviaire britannique. Plus précisément, la construction a été essentiellement financée en titres sur la bourse de Londres, et les trains étaient également britanniques. L’écartement des rails était celui de la norme britannique, mais la norme coloniale, non pas la norme nationale. En conséquence, les chemins de fer japonais furent longtemps beaucoup plus étroits que les chemins de fer européens et Américains, et les trains eux-mêmes étaient plus étroits.

L’acquisition des fonds et des matériaux fut confiée à Horatio Nelson Lay, un financier britannique présenté par Parkes. Cependant, il s’avéra qu’il essaya de tromper le gouvernement japonais et de gagner de l’argent grâce aux intérêts. Lorsque la fraude fut découverte, Lay fut licencié, mais des commandes avaient déjà été passées pour des trains d’occasion et des rails à voie étroite. Ôkuma Shigenobu a regretté plus tard avoir adopté la voie étroite, déclarant que c’était « l’erreur de [sa] vie ».

Quoi qu’il en soit, le premier chemin de fer japonais s’est construit en dépendance totale au savoir-faire des Britanniques.

Un vestige ferroviaire exhumé en 2019 à Tokyo

En avril 2019, lors des travaux d’aménagement de la gare tokyoïte de Shinagawa, les vestiges d’un ouvrage d’art de cette époque, la Digue de Takanawa, en support d’une voie ferrée ont été mis au jour. Il s’agissait d’une digue trapézoïdale, de 6,4 m de large, construite sur la baie de Tokyo, en terre et sable, renforcée des deux côtés par de solides murs de maçonnerie, et supportant des rails.

La Digue de Takanawa, répertoriée comme site historique national (Image avec l’aimable autorisation de l’arrondissement de Minato, Tokyo. Jiji)
La Digue de Takanawa, répertoriée comme site historique national (Image avec l’aimable autorisation de l’arrondissement de Minato, Tokyo. Jiji)

La construction avait commencé en 1870, et le mur de pierre de 2,7 km de long fut construit dans les eaux peu profondes de la baie de Tokyo avec les méthodes de construction traditionnelles japonaises. Avec sa belle maçonnerie et sa forme en arc, elle est un véritable mélange des styles japonais et occidental, et constitue un vestige extrêmement précieux, sans équivalent dans le monde, des efforts de modernisation de cette époque.

Pourquoi une digue et des rails au-dessus de la mer ?

En fait, le premier tracé de la ligne traversait des terrains qui appartenaient au ministère des Affaires militaires (qui s’est appelé plus tard ministère de l’Infanterie et de la Marine), mais le samuraï Saigô Takamori qui avait toute autorité sur le ministère, et les hauts fonctionnaires, étaient très réticents à les céder, le tracé fut modifié et la digue construite pour contourner les dits terrains militaires.

Pour Saigô, le renforcement militaire représentait une priorité absolue, et le développement des transports ne représentait qu’un objectif secondaire à ses yeux. Il était également opposé à l’idée d’emprunter de l’argent aux Britanniques pour construire le chemin de fer, car cela favorisait les conditions d’une agression étrangère.

La montée en puissance des ingénieurs japonais

Les travaux commencèrent en 1870. Morel est mort à l’âge de 30 ans d’une maladie pulmonaire, avant leur achèvement. Son adjoint, John Diack, reprit la conduite des travaux, avec l’aide d’Inoue Masaru, qui venait d’être nommé premier directeur du chemin de fer (tetsudô no kami).

Inoue, originaire de la préfecture de Yamaguchi, était l’un des « cinq génies de Chôshû » des étudiants qui sont passés clandestinement en Grande-Bretagne en 1863, à la fin de l’époque d’Edo, à l’époque où cela était encore interdit, avec Itô Hirobumi, futur premier ministre. À Londres, il se forme à l’ingénierie ferroviaire et minière, avant de retourner au Japon en 1968. L’année suivante, il entre au service du gouvernement Meiji et s’implique pleinement dans la construction du chemin de fer après la mort de Morel. (Voir notre article : Les « cinq génies de Chôshû » et la fondation d’un État moderne au Japon)

Vue d’oiseau du chemin de fer à vapeur de Tokyo, par Utagawa Yoshitora (collection de la Bibliothèque nationale de la Diète). Publié l’année précédant l’ouverture du chemin de fer, le tracé est imaginaire. Il montre les hautes attentes du public de l’époque à l’égard des chemins de fer.
Vue d’oiseau du chemin de fer à vapeur de Tokyo, par Utagawa Yoshitora (collection de la Bibliothèque nationale de la Diète). Publié l’année précédant l’ouverture du chemin de fer, le tracé est imaginaire. Il montre les hautes attentes du public de l’époque à l’égard des chemins de fer.

Après bien des difficultés, le premier chemin de fer du Japon fut officiellement ouvert au trafic le 14 octobre 1872 (12 septembre selon le calendrier lunaire). Ce jour-là, une grande cérémonie eut lieu dans le hall du chemin de fer de Shimbashi (gare de Shimbashi) en présence de l’empereur Meiji. La cérémonie a été suivie par de hauts fonctionnaires du gouvernement, des conseillers d’État, ainsi que des diplomates de différents pays. Les citoyens ordinaires étaient également autorisés à observer la cérémonie. Il est intéressant de noter que les hauts fonctionnaires du gouvernement portaient le hitatare, la tenue de cérémonie de la classe des samouraïs. Un spectacle à tout point de vue surprenant pour une cérémonie marquant l’ouverture d’une nouvelle civilisation.

L’ancien dépôt de Shimbashi, juste avant son ouverture en 1872. Conçue par l’architecte américain Richard Bridgens, elle est devenue gare de marchandises lorsque la gare de Tokyo a été ouverte en 1914. Le bâtiment principal de la gare a été détruit par un incendie lors du Grand tremblement de terre du Kantô. Image avec l’aimable autorisation de la Japan National Railways Liquidation Corporation. (Jiji)
L’ancien dépôt de Shimbashi, juste avant son ouverture en 1872. Conçue par l’architecte américain Richard Bridgens, elle est devenue gare de marchandises lorsque la gare de Tokyo a été ouverte en 1914. Le bâtiment principal de la gare a été détruit par un incendie lors du Grand tremblement de terre du Kantô. Image avec l’aimable autorisation de la Japan National Railways Liquidation Corporation. (Jiji)

Le bâtiment de l’ancienne gare de Shimbashi fut reconstruit à l’identique à Shiodome en 2003. Les fouilles effectuées avant les travaux de réaménagement ont mis au jour des vestiges des premiers jours du chemin de fer, notamment des portions du quai, dont certains sont exposés au musée. (Jiji)
Le bâtiment de l’ancienne gare de Shimbashi fut reconstruit à l’identique à Shiodome en 2003. Les fouilles effectuées avant les travaux de réaménagement ont mis au jour des vestiges des premiers jours du chemin de fer, notamment des portions du quai, dont certains sont exposés au musée. (Jiji)

Lors de la cérémonie, l’empereur Meiji prononça un discours de félicitations à ses sujets, se réjouissant du développement de la civilisation et louant les efforts des personnes impliquées dans le projet.

Après la cérémonie, l’empereur est monté à bord du train pour le trajet de 23,8 km aller-retour entre Shimbashi et Yokohama. À bord du train se trouvaient Sanjô Sanetomi, Yamagata Aritomo, Ôkuma Shigenobu, Eto Shimpei, Katsu Kaishû et bien d’autres. Saigô Takamori, qui avait pourtant refuser de céder les terrains du ministère de la Guerre, était également à bord.

Illustration d’Utagawa Hiroshige III. L’avènement du premier service ferroviaire japonais, entre la gare de Shimbashi et Yokohama, en 1872. (Avec l’aimable autorisation du musée d’histoire de l’arrondissement de Minato, Tokyo)
Illustration d’Utagawa Hiroshige III. L’avènement du premier service ferroviaire japonais, entre la gare de Shimbashi et Yokohama, en 1872. (Avec l’aimable autorisation du musée d’histoire de l’arrondissement de Minato, Tokyo)

De nombreuses rumeurs et histoires insolites à propos de cet étrange véhicule

Les tarifs pour un aller simple de Shimbashi à Yokohama étaient de 1,125 yen en 1ere classe, 0,75 yen en 2e classe, et 0,375 yen en 3e classe. Ce qui correspond à plus de 5 000 yens (35 euros) d’aujourd’hui, même en 3e classe. Les chemins de fer étaient encore très chers. L’année suivante, en 1873, les tarifs baissèrent jusqu’à 1 yen en 1ere classe, 0,60 yen en 2e classe, et 0,30 yen en 3e classe, ce qui est toujours très cher. La vue du train roulant avec son panache de fumée s’élevant au-dessus des murs de pierre sur la mer impressionnait tout le monde et fut souvent représentée dans les estampes du temps, aller regarder passer le train devint une attraction touristique populaire.

Le train vers le Paradis, 1872, extrait de la série « Voyage au Paradis et en Enfer » de Kawanabe Kyôsai, Musée d’art Seikadô Bunko. (Image reproduite avec l’aimable autorisation du Musée d’art Seikadô Bunko / DNPartcom)
Le train vers le Paradis, 1872, extrait de la série « Voyage au Paradis et en Enfer » de Kawanabe Kyôsai, Musée d’art Seikadô Bunko. (Image reproduite avec l’aimable autorisation du Musée d’art Seikadô Bunko / DNPartcom)

Les Tokyoïtes mirent néanmoins du temps pour se familiariser avec ce nouveau moyen de transport et de nombreuses anecdotes insolites sont restées. Par exemple, À chaque départ du train, de nombreuses chaussures se trouvaient abandonnées sur le quai : comme il est d’usage d’enlever ses chaussures avant de pénétrer dans une pièce, de nombreux passages se déchaussaient sans y penser en montant à bord… oubliant leurs chaussures sur le quai.

Aussi, de nombreux badauds, voyant passer le train, l’arrosaient d’eau : vu la vapeur qui s’échappait, ils pensaient qu’il devait avoir chaud !

Il n’y avait pas de toilettes aménagées dans les wagons, et de nombreuses personnes, prises d’un besoin pressant, urinaient par les fenêtres ! Fait unique, un voyageur fut verbalisé pour avoir laché un pet : un samouraï de Nagasaki, Fukagawa Yasaku, ayant pris le train à Yokohama, se senti barbouillé. Ne voulant pas péter sans rien dire dans un endroit clos en présence d’autres personnes, il retroussa son kimono pour envoyer sa flatulence par la fenêtre. Ce qui était contraire à l’article 6 du règlement des chemins de fer, et lui coûta une amende de 5 yens !

Locomotive n° 1. Bien culturel d’importance nationale, construite en Grande-Bretagne en 1871 et mise en service entre Shimbashi et Yokohama en 1872. (Collection du Musée des chemins de fer)
Locomotive n° 1. Bien culturel d’importance nationale, construite en Grande-Bretagne en 1871 et mise en service entre Shimbashi et Yokohama en 1872. (Collection du Musée des chemins de fer)

Essor des chemins de fer privés et nationalisation

Les lignes de Kobe-Osaka et Kyoto-Osaka furent ouvertes ensuite, en 1874 et 1877 respectivement.

En 1880, Inoue Masaru, qui excellait dans les technologies minières, perça le tunnel du mont Ôsaka entre Kyoto et Ôtsu. Même si des accidents furent à regretter pendant la construction, c’est le premier tunnel creusé uniquement par des ingénieurs japonais. À cette époque, le gouvernement avait licencié les ingénieurs étrangers et lancé une politique de gestion du système ferroviaire par des mains japonaises.

L’année suivante, en 1881, la « Compagnie des Chemins de fer Japonais » (Nippon Tetsudô Kakushikigaisha), première compagnie ferroviaire privée, est créée, grâce à des investissements de la noblesse. Le gouvernement ne pouvant plus construire de nouveaux chemins de fer en raison de difficultés financières après la guerre civile, la création de sociétés de chemins de fer privées fut autorisée et le Bureau des chemins de fer (un organisme d’État) lui sous-traita la constructions et l’exploitation de nouvelles lignes.

La première réalisation de cette nouvelle société fut l’ouverture, en 1883, de la ligne Ueno – Kumagaya (Saitama). La ligne fut prolongée au fil des années et permit le transport industriel de produits de soie brute et de charbon. D’autres compagnies privées virent le jour dans les années 1880. C’est dans les années 1890 que les chemins de fer privés dépassent les chemins de fer publics en termes de distances d’exploitation.

Toutefois, en mars 1906, le premier cabinet Saionji Kinmochi promulgua la loi de nationalisation des chemins de fer. Au cours de la guerre russo-japonaise, qui s’était terminée en septembre de l’année précédente, de nombreux soldats et matériels militaires furent transportés par rail, mais l’existence de lignes privées, et la réglementation sur les tarifs rendait compliquée l’exploitation de trains directs. La nationalisation des chemins de fer était une demande des militaires afin de faciliter le transport des troupes. Un autre facteur important a été l’appel à la création d’un réseau national unifié de voies dans une perspective industrielle.

À l’issue de la guerre sino-japonaise de 1894-95 et l’annexion de Taïwan, le Japon commença à construire des chemins de fer dans cette nouvelle colonie. Des lignes furent même exploitées par le Japon sur le continent à partir de la guerre russo-japonaise.

Les terres cédées par la Russie en vertu du traité de Portsmouth à l’extrémité de la péninsule de Liaodong devinrent la province de Kwantung. Le gouvernorat de Kwantung fut institué à Lushun (Port Arthur) pour contrôler ces territoires, et la compagnie ferroviaire de Mandchourie (South Manchuria Railway Company) fut créée en 1906 pour exploiter l’ancien chemin de fer Qing oriental entre Changchun et Lushun et les mines de charbon situées le long de la ligne ferroviaire. C’était une société mixte, semi-gouvernementale, semi-privée.

Ainsi, en un peu plus de 30 ans, un réseau de lignes de chemin de fer a été mis en place à travers le pays, ainsi qu’à l’étranger, notamment à Taïwan et en Mandchourie, exclusivement exploités par les Japonais. En ce sens, le développement des chemins de fer est un symbole de la modernisation du Japon.

(Photo de titre : Utagawa Hiroshige III, « Locomotive à vapeur du chemin de fer côtier de Yokohama », 1874, collection du musée d’histoire de la préfecture de Kanagawa. À l’époque de l’ouverture du chemin de fer, de nombreux peintres ont représenté des trains et des gares en estampes.)

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