Les 24 divisions de l’année solaire au Japon

« Usui » : l’eau de pluie

Vie quotidienne Tradition

L’année solaire au Japon est traditionnellement divisée en 24 sections principales, et commence avec le Risshun (le début du printemps), en février. Nous voici dans la deuxième période, appelée Usui, du 19 février au 5 mars. C’est la saison de la fonte des neiges et du retour de la pluie, alors penchons-nous sur les événements et les phénomènes naturels qui la jalonnent.

La saison appelée Usui, qui, selon le calendrier moderne, commence approximativement le 19 février, est celle où les chutes de neige laissent place à la pluie. Le froid est moins vif, et la terre et les champs font bon accueil au retour des eaux de pluie, propice au bourgeonnement. Le moment est venu de se préparer pour la saison des cultures.

Cet article va se pencher sur les événements et les phénomènes naturels qui jalonnent la période allant du 19 février au 5 mars.

Sankan shion

Cette expression japonaise (« trois jours froids, quatre jours chauds ») fait référence au réchauffement progressif du temps. Le froid et le chaud alternent en cycles de sept jours à mesure de l’approche du printemps.

Kitano Tenmangû, le Festival des fleurs de pruniers (25 février)

Sugawara no Michizane (845-903) est né dans une famille d’érudits, et on dit de lui qu’il a composé de la poésie waka dès l’âge de cinq ans. Dans la religion shintô, il est vénéré en tant que dieu de l’apprentissage : Tenman Tenjin. Son rival politique, Fujiwara no Tokihira (871-909) l’avait fait bannir de Kyoto et affecter à un poste subalterne à Dazaifu, dans l’île de Kyûshû, où il est mort de désespoir deux ans plus tard. Après son décès, Kyoto a été frappé par la foudre et d’autres catastrophes naturelles, et la mauvaise chance est advenue à ceux qui avaient joué un rôle dans son bannissement...

Interprétant cela comme une malédiction, les gens ont déifié Michizane sous les traits de Tenjin (le dieu du tonnerre) et construit en son honneur le sanctuaire Tenmangû, dans l’actuelle Fukuoka. Finalement, soucieux de pacifier son esprit, ils ont également bâti le Kitano Tenmangû à Kyoto, connu comme le chef de file des quelque 10 000 sanctuaires Tenmangû que compte le Japon. Parce que Michizane chérissait les fleurs de pruniers, ces arbres figurent en général dans l’enceinte des sanctuaires. Le très populaire festival annuel des fleurs de pruniers du Kitano Tenmangû (25 février) est célèbre pour ses nombreux étals de denrées alimentaires et d’antiquités. (Voir notre article : Trois sites de choix à Kyoto pour admirer les pruniers en fleurs)

Le festival des fleurs de pruniers du Kitano Tenmangû de Kyoto (© Pixta)
Le festival des fleurs de pruniers du Kitano Tenmangû de Kyoto (Pixta)

Le rituel Shuni-e (du 1er au 14 mars)

Le Shuni-e est un rituel bouddhique célébré du 1er au 14 mars. Les participants se repentent de leurs péchés quotidiens et prient pour la paix, une récolte abondante et la bonne santé des gens. Le Shunie le plus célèbre est celui qui se tient au temple de Tôdai-ji, à Nara, où il est célébré depuis plus de 1 250 ans, même en temps de guerre. Le 12 mars, à l’occasion d’une cérémonie connue sous le nom d’Omizutori (littéralement « le tirage de l’eau »), de l’eau provenant de Wakasa, dans la préfecture de Fukui, et parfumée à l’encens est utilisée lors d’une prière. Les moines président aussi à un rituel ascétique du feu appelé Dattan, au cours duquel ils brandissent des torches en pin dans le pavillon intérieur du Nigatsu-dô, un édifice en bois. Les croyants se pressent pour se baigner dans les étincelles qui s’envolent des torches et ont la réputation de garantir une bonne santé tout au long de l’année.

Le service Shuni-e du Tôdai-ji. (Kyôdô News)

Hina-matsuri (3 mars)

Le festival japonais des poupées Hina prend son origine dans un rituel pratiqué à la cour impérial depuis l’époque de Heian (794-1185) en vue de prier pour la santé des enfants de sexe féminin. Pour le célébrer, les Japonais érigent des étalages sophistiqués de poupées et de fleurs de pêchers. Les gâteaux de riz à trois couches et en forme de diamants appelés hishimochi sont populaires à cette époque de l’année. La couche rose est colorée avec du gardénia, la couche blanche contient de la châtaigne d’eau, et la verte est obtenue à partir de l’armoise. Parmi les autres préparations emblématiques des festivals de poupées figurent le bouillon clair de palourdes hamaguri, le chirashi-zushi (riz à sushi accompagné d’ingrédients disposés au-dessus) et le saké blanc doux (shirozake). (Voir notre article : Le 3 mars : « Hina matsuri », la fête des filles)

Bouillon clair de palourdes hamaguri servi avec du chirashi-zushi (à gauche). Hishimochi et shirozake.
Bouillon clair de palourdes hamaguri servi avec du chirashi-zushi (à gauche). Hishimochi et shirozake.

Les palourdes hamaguri

Au Japon, les palourdes hamaguri occupent une place essentielle dans le Hina-matsuri et lors des noces. La palourde hamaguri est le seul coquillage qui s’harmonise parfaitement avec son partenaire, et c’est pourquoi elle est considérée comme un symbole d’harmonie au sein d’un couple. Le kai-awase est un jeu d’appariement de coquillages, en vigueur depuis l’époque de Heian, qui utilise des coquilles de palourdes magnifiquement peintes. Une délicieuse recette saisonnière pour les palourdes consiste à les cuire à la vapeur de saké, comme dans le plat connu sous le nom de sakamushi, consommé en hiver et au printemps.

Coquillages de kai-awase (à gauche), illustrés de scènes tirées du Dit du Genji. Sur les coquillages de droite est représenté Yûgao. (© Photo Library)
Coquillages de kai-awase (à gauche), illustrés de scènes tirées du Dit du Genji. Sur les coquillages de droite est représenté Yûgao. (© Photo Library)

La signification de Dassai

Dassai est une marque de saké célèbre, mais peu de gens connaissent l’origine de ce nom, qui, au sens littéral, signifie « festival de la loutre ». À mesure que le printemps approche, les poissons abondent et les loutres de rivière en attrapent qu’elles alignent devant elles avant de les manger. On a l’impression qu’elles célèbrent un « festival de la loutre » au cours duquel elles font des offrandes dans un sanctuaire.

Noyaki (brûlage des terres)

Avant l’introduction des pesticides agricoles, les cultivateurs brûlaient les herbes sèches afin d’éliminer les insectes nuisibles, et la cendre servait d’engrais pour faire pousser le fourrage destiné aux vaches et aux chevaux. Le noyaki est une tradition transmise de génération en génération depuis plus de 1 000 ans, et il reste un rituel printanier pratiqué en divers endroits, tels que le mont Wakakusa dans la préfecture de Nara et le mont Aso dans la préfecture de Kumamoto.

Fukujusô (adonis ramosa)

Cette fleur est un symbole de bonne fortune et de longévité. À l’époque d’Edo (1803-1868), on croyait qu’elle portait chance et, aujourd’hui encore, on la plante en pot et on s’en sert pour faire des cadeaux.

Fukujusô (adonis ramosa) (© Pixta)
Fukujusô (adonis ramosa) (Pixta)

Les fraises

La cueillette des fraises a lieu dans le Japon tout entier à partir de la mi-janvier. La préfecture de Tochigi est particulièrement célèbre pour ses fraises, et notamment la variété Tochiotome. (Voir notre article : Les fraises de Tochigi, joyaux de l’agriculture japonaise)

(© Pixta)
Photo : Pixta

Voir aussi nos deux articles précédents

(Article rédigé avec l’aide d’Inoue Shôei, chercheur sur le calendrier et auteur, prêtre shintô, professeur invité à l’Université Tôhoku Fukushi. Photo de titre : le lac de cratère Jigoku-numa après la fonte des glaces, dans les monts Hakkôda, préfecture d’Aomori © Photo Library)

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