Quand gourmandise rime avec plaisir

Les succulentes créations de quatre confiseurs japonais du nord-est du Japon

Gastronomie Région

Quatre confiseurs de la région du Tôhoku, située au nord-est de l’île principale de Honshû, allient avec ingéniosité le savoir-faire traditionnel avec les techniques actuelles de fabrication pour donner naissance à des gourmandises originales. Une bonne occasion de se familiariser avec quelques noms de pâtisseries nippones tout en ayant l’eau à la bouche !

« Fly Me To the Moon », une pâtisserie qui raconte une histoire

C’est depuis 1848 qu'œuvre la fabrique Nagatoya, dans la ville d’Aizu-Wakamatsu (préfecture de Fukushima). À l’époque, seules les riches pouvaient se permettre de déguster les jôgashi, ces patisseries de qualité supérieure préparées avec du sucre blanc raffiné. Il est dit toutefois que le seigneur du domaine d’Aizu voulait que son peuple puisse également y goûter. Inspiré par le souhait du seigneur, le fabriquant de saké Nagatoya a décidé de se mettre à la confiserie.

Au départ, la boutique fabriquait principalement des friandises peu chères avec des brisures de riz, du millet, ou des haricots rouges sucrés avec un sucre roux appelé kokutô, du riz glutineux pour mochi, ou de la fécule de patate douce. De nos jours, Nagatoya continue la tradition de fabriquer des confiseries abordables pour les habitants des environs.

La façade traditionnelle de la boutique Nagatoya à Nanokamachi (© Aizu Nagatoya)
La façade traditionnelle de la boutique Nagatoya (© Aizu Nagatoya)

Au fil des années, Nagatoya a élargi sa palette, avec par exemple des pâtisseries à base de pain, tout en restant fidèle aux produits traditionnels faits-main, qui sont remaniés au goût du jour. Dernièrement, la boutique s’est fait remarquer par sa nouvelle gamme de confiseries traditionnelles, inaugurée suite au grand tremblement de terre du 11 mars 2011.

Les rumeurs qui ont circulé après l’accident nucléaire de la centrale de Fukushima Dai-ichi ont fait beaucoup de tort aux produits alimentaires venant de la région, y compris les friandises de Nagatoya, et ont semé le doute sur leur avenir. C’est grâce au soutien des fidèles clients locaux que le propriétaire a tenu le coup. Les histoires qu’on lui racontait sur la façon dont ses friandises évoquaient des souvenirs heureux l’ont incité à rester positif et confiant sur les liens historiques entre la boutique et ses clients. Conscient de l’importance de faire perdurer cette précieuse relation, le propriétaire a décidé d’innover pour offrir une nouvelle santé à son commerce. Pour ceci, il a fallu s’adapter à l’époque moderne tout en gardant les saveurs et les techniques traditionnelles.

Cette nouvelle approche a donné naissance entre autres à la gamme « Fly Me To the Moon » (Emmène moi sur la lune), dévoilée en 2017. Inspirée par la chanson jazz du même nom, cette friandise est à base de yôkan, une pâte de haricot rouge gélifiée avec de l’agar-agar (kanten). Il est courant de donner aux gâteaux japonais traditionnels (wagashi) des noms qui font référence à des anciens poèmes ou chansons de saison. Mais l’idée, dans l’utilisation du nom d’un air de jazz connu, est de raconter une histoire que tout le monde comprendra, quel que soit leur parcours.

Le conte en friandise, Fly Me To The Moon Yōkan Fantasia, se vend ¥3500 (© Aizu Nagatoya)
Le conte en friandise, Fly Me To The Moon Yôkan Fantasia, se vend 3 500 yens (26 euros) (© Aizu Nagatoya)

En coupant la friandise, qui fait 10 cm de long, on découvre, image par image, l’histoire d’un oiseau bleu qui s’envole vers la lune. Avec chaque tranche, l’envol de l’oiseau et le quartier de la lune changent, créant un effet de folioscope. La lune et l’oiseau bleu ont un petit goût d’agrumes, tandis que les montagnes d’Aizu sont faites de pâte de haricots rouges azuki. Le ciel nocturne est fait de kingyokukan, une gelée décorative transparente faite d’agar-agar et de sucre, et la brume dorée qui scintille a un petit goût de champagne. Avec sa garniture de raisin et cranberry, il s’allie parfaitement au thé vert, thé noir, ou vin.

L’emballage représente un beau dessin de la lune et l’oiseau. (© Aizu Nagatoya)
L’emballage représente un beau dessin de la lune et l’oiseau. (© Aizu Nagatoya)

Aizu Nagatoya

  • Adresse : 3-30 Nanokamachi, Aizu-Wakamatsu-shi, Fukushima-ken
  • Horaires : 9 h 00 à 17 h30
  • Accès : à quelques minutes de marches de la gare Nanukamachi (ligne JR Tadami)
  • Site officiel

Des prunes acidulées à la rencontre d’une ganache crémeuse

Le pèlerinage de Dewa Sanzan, dans la préfecture de Yamagata, consiste à traverser les trois sommets sacrés de Haguro, Gassan et Yudono. Nombreux pélerins goûtent au noshi-ume, une spécialité locale faite d’abricots moelleux. On trouve le noshi-ume dans les boutiques de souvenirs un peu partout au Japon, mais la pâtisserie, à l’origine, vient de la confiserie Satôya, à Yamagata.

La boutique a été fondée en 1821 par Satô Matsubei, le fils d’une famille locale de médecins. Satô a donné naissance à une confiserie qu’il a appelé noshi-ume, à base de la technique familiale de fabrication d’un fortifiant à base de ume (prune japonaise) bouillies qui était en vogue pendant pendent l’époque d’Edo (1603-1868). La recette a évolué au fil des années et la friandise a trouvé sa forme actuelle vers 1870. Pour fabriquer le noshi-ume, on commence par sécher du ume-yôkan, une espèce de pâte de fruits à base de prunes de Yamagata. Sa petite taille et longue conservation en font un excellent souvenir.

La boutique Satôya principale est toujours au même endroit (© Noshiume Honpo Satōya)
La boutique Satôya principale est toujours au même endroit depuis 1821 (© Noshiume Honpo Satōya)

Satô Shintarô représente la huitième génération de propriétaires, et il a voulu remanier la pâtisserie au goût du XXIe siècle. « Ça commencait à prendre de l’âge », explique-t-il, « comme si c’était une friandise de chez grand-mère. »

Il a donc travaillé à la création d’une variante qu’il a nommé Tamayura :une alliance de noshi-ume et de chocolat qui donne une nouvelle tournure à une confiserie traditionnelle perfectionnée à travers les années.

Satô s’est trouvé très inspiré par les orangettes, ces écorces d’oranges confites enrobées de chocolat. Les oranges confites étaient comparables au noshi-ume, mais enrober ce dernier de chocolat chaut le ferait fondre. Il a donc décidé d’essayer de superposer le noshi-ume sur une ganache. Mais la ganache, faite de chocolat et de beurre ou de crème, ne s’accordait pas bien avec sa pâtisserie malgré beaucoup de matière grasse et un arrière-goût solide. Au lieu du beurre, Satô a donc essayé du shiroan, une pâte sucrée composée de haricots blancs. Le résultat est une friandise avec un riche arôme de cacao et un arrière-goût délicat, mais qui ne fond pas facilement.

Satô admet qu’il a demandé de l’aide à un ami chocolatier pour la ganache, mais que c’était son idée de rajouter le shiroan. « C’est le résultat de mes années à fabriquer des confiseries japonaises ». La devise de Satôya est devenue « la libération du wagashi » et Satô lui-même continue à chercher de nouvelles façons d’innover.

La boite de six noshi-ume se vend 1 080 yens (8 euros) (© Noshiume Honpo Satōya)
La boite de six noshi-ume se vend 1 080 yens (8 euros) (© Noshiume Honpo Satôya)

Noshiume Honpo Satôya

  • Adresse : 3-10-36 Tôkamachi , Yamagata-shi, Yamagata-ken
  • Horaires : 8 h 30 - 18 h
  • Accès : 10 minutes de marche de la gare JR Yamagata
  • Site officiel

Des biscuits salés hauts en couleur

Les Nanbu senbei sont une spécialité de la préfecture d’Iwate, ainsi que de la région de Hachinohe, dans la préfecture d’Aomori. Ils sont préparés à base de sel, farine de blé et d’eau, et sont cuits dans des moules spéciaux ronds jusqu’à ce qu’ils deviennent durs et croquants. Les annaux croustillants qui se forment autour du moule leur donnent un charme et caractère particulier. Certains de ces biscuits salés incorporent du sésame ou des cacahuètes dans la pâte.

La boite de cinq Chopetto Nanbu Senbei coûte ¥1944, ¥1350 pour la boite de trois
La boite de cinq Chopetto Nanbu senbei coûte 1 944 yens (14,5 euros) et 1 350 yens (10 euros) pour la boite de trois.

Les Chopetto sont une variante haute en couleur des biscuits Nanbu senbei, faits pour séduire l’œil et le palet. Spécialités de la boutique Hati, ils sont une création de Ôtsuburai Risa, coordinatrice de mode de vie à Hachinohe, et du confiseur Manodo & Corte. Les biscuits sont enrobés de chocolat belge, de noix, fruits secs et même de pétales de rose séchées, donnant ainsi à une friandise traditionnelle un aspect unique, ainsi qu’un arôme et une texture inédites.

Il existe cinq varieties de craquelins, y compris, noix et lait, et rose et fruits rouge
Il existe cinq varieties de biscuits, y compris, noix et lait, et rose et fruits rouge.

Hati style

  • Adresse : 41-2 Nijûsannichi-machi, Hachinohe-shi, Aomori-ken
  • Horaires : 13 h à 19 h
  • Accès : 16 minutes de marche de la gare Hon-Hachinohe
  • Site officiel

Les confiseries traditionnelles de Sendai en version moderne

Date Masamune (1567-1636), le grand seigneur du domaine de Sendai, était un grand adepte de la cérémonie du thé, et la pratique s’est répandue parmis les citoyens de la ville fortifiée. Le thé vert japonais est toujours servi avec une friandise, mais les confiseries fabriquées à base de sucre raffiné étaient chères et donc réservées à l’aristocratie. Par contre, les gâteaux appelés « Sendai dagashi », fabriqués avec les rations gouvernementales de riz et fécule de marrons, étaient abordables.

Les coffrets de saison de Sendai Kokochi Kiyose se vendent ¥750
Les coffrets de saison de la boutique Hitachiya se vendent 750 yens (5,5 euros).

La confiserie Hitachiya, fondée en 1937, a repensé ces dagashi traditionnels de Sendai en versions modernes, rebaptisées « Sendai kokochi ». Le mélange maison de confiseries comprend des bouchées de okoshi (millet soufflé), des boules de pâte de haricot sucré, des pâtes à la tomate ou à l’agrume yuzu, et des petits carrés durs de farine de soja kinako.

	Un assortiment de boules de pate d’haricot sucré et de friandises à la fécule de soja
Un assortiment de boules de pâte de haricot sucré et de friandises à la fécule de soja.

Sendai Dagashi Honpo Hitachiya

  • Adresse : S-Pal Sendai Basement Level 1, Chûô 1-1-1, Aoba-ku, Sendai-shi, Miyagi-ken
  • Horaires : 10 h à 20 h
  • Accès : quelques minutes de marche de la gare JR Sendai
  • Site officiel

(Reportage et texte de Shoe Press. Photo de titre : la pâtisserie appelée Fly Me To The Moon Yôkan Fantasia, de la confiserie Aizu Nagatoya, préfecture de Fukushima. Photos : Shoe Press, sauf mentions contraires)

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