Revitalisation locale et autonomie des régions : la politique inachevée du gouvernement japonais

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Après la démission du Premier ministre Abe Shinzô, de nombreux spécialistes dressent son bilan en matière de politique économique, étrangère et de sécurité nationale du pays. Mais ici, intéressons-nous plutôt au niveau local, qui n’est que rarement évoqué. Qu’a fait l’ancien dirigeant japonais pour revitaliser les zones rurales ? Que peut-on dire de l’autonomie des régions par rapport au gouvernement central ?

Le problème de la concentration urbaine non résolu

Dans sa déclaration de démission le 28 août 2020, le Premier ministre Abe Shinzô a fait le bilan de ses trois mandats successifs passés à la tête du pouvoir. Il a principalement évoqué les Abenomics et la politique étrangère, que ce soit l’Accord de partenariat transpacifique (TPP) ou la législation sur la sécurité collective. Toutefois, il a regretté le peu de progrès faits sur des dossiers qui lui tenaient à cœur tels que la révision de la Constitution, jamais amendée depuis 1947, la conclusion d’un traité de paix avec la Russie et les enlèvements de ressortissants japonais par la Corée du Nord.

Néanmoins, l’un des plus grands défis du Japon n’a été que peu mentionné : le dépeuplement de l’Archipel et la revitalisation des régions (chihô sôsei), la politique phare du gouvernement initiée en 2014 pour y remédier. Interrogé à ce sujet, Abe Shinzô a reconnu la situation tout en concédant : « La concentration à Tokyo se poursuit mais notre administration est parvenue à en ralentir considérablement la vitesse ».

En réalité, ses propos sont loin d’être exacts. En 2019, l’afflux net de personnes dans la zone métropolitaine de Tokyo était de 149 000. Il a donc doublé depuis 2012, année de prise de fonction d’Abe au poste de dirigeant. Si la pandémie actuelle a certes fortement réduit ce chiffre, cette tendance n’est vraisemblablement que passagère. L’écart de richesses entre Tokyo et le reste du pays étant toujours important (le revenu par habitant dans la préfecture de Tokyo est environ 1,65 fois supérieur à la moyenne nationale), les grandes villes continuent de séduire.

Penchons-nous donc sur le bilan de la politique à l’échelle locale entre 2012 et 2020, qui n’est que rarement évoqué. Il est au contraire important de revenir sur ces domaines pour connaître les accomplissements de l’ancien chef du gouvernement nippon et aussi et surtout anticiper l’avenir du Japon. Les zones rurales jouent un rôle crucial dans l’évolution de la démographie et l’économie politique nippone. Abe Shinzô est-il parvenu à rétablir un développement équilibré des zones rurales ? Quid de ses relations avec les gouvernements et les hommes politiques locaux ? 

Une revitalisation locale en demi-teinte

Le Premier ministre Abe Shinzô a cherché à se démarquer dès le début de son mandat, notamment en augmentant les dépenses de travaux publics. Ainsi, en 2013, une loi a été adoptée ainsi que divers budgets avec pour objectif de « rendre le territoire japonais plus résistant » aux catastrophes naturelles. Les dépenses de travaux publics ont quasiment doublé, passant de 4 500 milliards de yens (36,6 milliards d’euros) en 2011, année qui marquait la fin des gouvernements démocrates, à 7 000 milliards de yens (57 milliards d’euros) en 2019. La construction reste un secteur majeur pour de nombreuses régions. Qui plus est, le changement climatique entraînant une fréquence accrue des tremblements de terre et des inondations, la population a-t-elle peut-être été reconnaissante envers le gouvernement Abe. Toutefois, il n’est pas certain que des budgets aussi faramineux puissent être maintenus et permettent la création d’emplois suffisamment attractifs pour changer la donne du dépeuplement des zones rurales.

Dans le domaine de l’agriculture, le message de l’administration Abe était clair : « passer à l’offensive ». Le Japon a notamment signé l’Accord de partenariat transpacifique (TPP) dans le but d’augmenter les exportations agricoles et a procédé à une déréglementation du secteur pour faciliter l’agriculture industrielle. Un grand nombre de ces réformes ont permis de venir à bout du lobby agricole JA et des figures politiques qui lui étaient affiliées. Le bilan, lui, est toutefois mitigé. Si les revenus, notamment ceux issus des exportations, et le nombre d’exploitations agricoles gérées par des entreprises a augmenté, le nombre d’agriculteurs à temps plein a chuté de 20 %, passant à 1,4 million. Plus encore, l’autosuffisance alimentaire du pays, basée sur les calories, est tombée à 38 %.

En plus de la construction et de l’agriculture, secteurs principaux dans les zones rurales, le Premier ministre Abe a exhorté les gouvernements locaux à élaborer leur propres stratégies pour la création d’emplois nouveaux et durables. Il s’agit de la politique chihô sôsei. Cette politique a connu des succès, largement relayés par les médias d’ailleurs, tels que la ville de Kamiyama, dans la préfecture de Tokushima, devenue grâce à un déploiement massif de technologies une plaque tournante pour les bureaux satellites et les sociétés de capital-risque. Cependant, dans l’ensemble, créer 300 000 emplois pour les jeunes dans les régions, mettre un terme à l’afflux de résidents à Tokyo avant 2020 ou encore déplacer davantage de sièges sociaux de ministères et d’entreprises hors de Tokyo, tous ces objectifs, eux, n’ont pas été atteints.

Kamiyama, dans la préfecture de Tokushima, a connu un certain succès en dynamisant l’économie locale grâce aux technologies de l'information (© Kozo/Pixta).
Kamiyama, dans la préfecture de Tokushima, a connu un certain succès en dynamisant l’économie locale grâce aux technologies de l’information. (Kozo/Pixta)

Autre politique phare du gouvernement Abe pour les régions : le système furusato nôzei (paiement des impôts dans sa ville natale). De l’idée de son successeur, l’ancien Secrétaire général Suga Yoshihide, ce système permet aux contribuables de faire don d’une partie de leurs impôts locaux à une collectivité locale de leur choix. Pour les remercier, ces dernières envoient des cadeaux, souvent des produits locaux, des aliments transformés ou des objets artisanaux. Introduit pour la première fois en 2008, le système a rencontré un grand succès en 2015, après que le montant maximum déductible a doublé. Il n’était non plus de 10 % mais de 20 %. Cependant, ce système a également rencontré un certain nombre de problèmes : perte de revenus pour les municipalités et l’État dans son ensemble, caractère régressif de la déduction, compétition acharnée entre les municipalités. Comme pour de nombreux programmes de revitalisation régionale du gouvernement Abe, il y a eu des gagnants mais surtout beaucoup de perdants.

Ce ne sont pas les seuls développements notables dans la politique économique locale du gouvernement Abe. Le bilan de l’augmentation du tourisme dans l’Archipel est mitigé pour les communautés locales et les économies régionales. La promotion de diverses zones spéciales de déréglementation a notamment été impliquée dans divers scandales de corruption tels que celui de Kake Gakuen, où un traitement de faveur a été accordé à l’école vétérinaire du même nom et un trafic d’influence sur les complexes de casinos. Par ailleurs, certaines zones rurales n’étaient pas prêtes à accueillir un nombre aussi important de travailleurs étrangers pour pallier le manque de main-d'œuvre dans les secteurs manufacturier et agricole. Aucune de ces mesures n’a permis de mettre un terme à l’exode des campagnes vers les villes, à la stagnation de l’indice de fécondité ou au dépeuplement.

Certains pensent que la situation actuelle de pandémie va au contraire entraîner une diaspora urbaine pour une vie plus rurale. Mais je pense qu’il serait exagéré d’y voir une fin de l’urbanisation. N’oublions pas que la capitale nippone s’est remise de bien des catastrophes telles que des tremblements de terre, des incendies, des bombardements, des attaques chimiques. Elle a également connu des cycles d’expansion et de récession au fil des siècles. Cela ne l’a pas empêchée de prospérer et de sans cesse attirer de nouveaux résidents. Je pense qu’une intervention du gouvernement central, plutôt que des initiatives au niveau local, serait nécessaire pour mettre un terme à la concentration des richesses et des emplois dans les villes.

Trois exemples symbolisant les relations entre le gouvernement et l’autonomie locale

L’autonomie des zones rurales est fortement liée à la revitalisation locale.

Si les relations du Premier ministre Abe aves les gouverneurs locaux étaient plutôt bonnes, son long mandat s’est tout de même accompagné de conflits majeurs. J’ai choisi d’analyser trois exemples qui montrent les limites de l’autonomie accordée au niveau local pendant le gouvernement Abe : l’île d’Okinawa, la ville d’Izumisano et la réponse apportée à la pandémie de Covid-19.

Parlons d’abord du problème d’Okinawa.

Se heurtant à l’opposition locale, les projets de relocalisation de la base aérienne américaine du corps des Marines de Futenma vers la ville de Nago, dans la baie de Henoko, sont retardés depuis 1997. Après son retour au pouvoir en 2012 et le durcissement de sa position sur la relocalisation de la base, le Parti libéral-démocrate (PLD) a essuyé de nombreux échecs face aux candidats réfractaires au projet. La formation politique n’a pas remporté un seul siège de district parlementaire ou de poste de gouverneur à Okinawa depuis 2013. Les appels répétés d’Okinawa à l’arrêt des travaux de construction de la base continuent cependant d’être rejetés devant les tribunaux. Lors d’un référendum local en 2018, 71 % des habitants d’Okinawa se sont dit opposés à la construction d’une nouvelle base. Toutefois, faisant fi de ce refus pourtant clair de la part de la population locale, le gouvernement Abe poursuit les travaux de remblaiement pour la construction de la nouvelle base dans la baie de Henoko. L’installation devrait voir le jour d’ici 2030.

Les travaux de construction se poursuivent à Henoko malgré l'opposition des habitants d’Okinawa (© Jiji).
Les travaux de construction se poursuivent à Henoko malgré l’opposition des habitants d’Okinawa. (Jiji Press)

Les actions d’Abe ont fini par diviser les habitants de l’île. Selon des sondages d’opinion publique, ces dernières années, les habitants d’Okinawa n’ont jamais été aussi méfiants envers le Japon métropolitain et les partis de la coalition au pouvoir, une occasion pour la politique identitaire d’Okinawa de s’affirmer davantage. Plus important encore, la répartition du fardeau de l’alliance américaine à travers l’Archipel a été un échec plus généralisé. Le gouvernement démocrate de Hatoyama Yukio avait proposé certaines initiatives pour relocaliser la base de Futenma dans d’autres préfectures. Mais depuis, peu sont ceux qui de leur propre chef ont émis le souhait d’assumer le fardeau injuste des bases d’Okinawa. Par ailleurs, le manque de solidarité entre les gouvernements locaux a été aussi significatif que celui de la volonté de Tokyo à accepter des échecs lors des différents scrutins dans la définition des limites de droit à l’autodétermination de l’île.

Évoquons maintenant un autre conflit centre-région qui prouve que le gouvernement ne l’emporte pas toujours.

En juin 2019, le ministère de l’Intérieur a exclu la ville d’Izumisano (préfecture d’Osaka) du système furusato nôzei. Selon lui, la préfecture avait abusé du système en offrant aux donateurs des cadeaux beaucoup trop luxueux pour rester dans l’esprit du système. Izumisano a vertement nié les faits. La ville a d’abord poursuivi le ministère devant la Haute cour d’Osaka, en vain. Refusant de s’avouer vaincue, elle a fait appel devant la Cour suprême, et a obtenu gain de cause. En juin 2020 cependant, à la surprise générale, la décision a été annulée à l’unanimité par la Cour suprême...

Dans cette affaire, ce sont les délibérations juridiques qui l’ont emporté. Il est clair que le ministère ne disposait pas d’une argumentation suffisante capable de s’opposer à l’application rétroactive de la loi. Depuis, afin d’éviter de futurs « abus », Tokyo a resserré les limites du système, en définissant la valeur et le type de cadeaux pouvant être envoyés aux généreux donateurs. Ainsi, les subventions spéciales de la ville d’Izumisano ont été réduites de plus de 90 %, ce pour quoi une action en justice à l’encontre du ministère est également en cours. Ce type d’actions de la part du gouvernement en dit long sur la façon dont les cordons de la bourse peuvent être utilisés pour faire plier les gouvernements locaux récalcitrants.

Enfin, tournons-nous vers la pandémie de Covid-19.

Les échanges ces derniers mois entre Tokyo et les différents gouverneurs préfectoraux concernant les mesures à prendre contre le coronavirus ont révélé un autre aspect de l’autonomie des régions : un moyen pour n’avoir à prendre ni de décisions difficiles ni de responsabilités.

Pourtant réputée pour être une administration plutôt autoritaire, la réponse du gouvernement Abe à la pandémie de Covid-19 a été passive et peu dynamique. Pas de confinement, aucune restriction obligatoire des déplacements et aucune usine réquisitionnée pour la production de masques ou d’équipements médicaux, comme cela a été le cas dans d’autres pays. Certains expliquent la tiédeur de ces mesures par le fait que la Constitution japonaise n’autorise pas le gouvernement à adopter des lois portant atteinte à la vie privée.

Autre interprétation de cette réaction peu engageante du gouvernement central : c’était un bon moyen d’éviter de prendre toute responsabilité. Devant les atermoiements du gouvernement Abe, les préfectures ont choisi de prendre les devants et de passer à l’action. Le gouverneur de Hokkaidô a été le premier à appeler la population à éviter les sorties nécessaires, la préfecture de Tokyo a été la première à venir en aide aux entreprises qui ont choisi de fermer pour lutter contre le coronavirus et celle d’Osaka a défini des valeurs chiffrées claires pour déterminer le moment de la levée de l’état d’urgence. (Voir notre article lié : Les plus jeunes et les plus habiles : gros plan sur les gouverneurs d’Osaka et de Hokkaidô et leur gestion de la crise du Covid-19)

Les préfectures de Wakayama et Yamagata ont activement mis en place des programmes de tests PCR avant le gouvernement national.

Si la réponse de l’administration Abe est restée hésitante, elle a été furtivement interventionniste ; pour preuve ses échanges conflictuels avec Tokyo. « Je pensais avoir l’autorité d’un PDG, mais en fait, je ne suis qu’un cadre moyen » a déclaré au mois d’avril la gouverneure de Tokyo, Koike Yuriko, après l’opposition du gouvernement central à la décision de Tokyo de demander la fermeture de certaines entreprises et installations pendant le pic de la pandémie. Pour les observateurs, le gouvernement central craignait que Tokyo ne crée un précédent pour les autres préfectures, et que ces dernières ne lui demandent à leur tour de financer l’indemnisation des entreprises ayant fermé leurs portes de leur propre chef.

Ironiquement, le manque de poigne du gouvernement Abe pendant la pandémie a entraîné une chute de sa cote de popularité, et indirectement mené à sa démission. Coup de théâtre : la stratégie qu’il avait adoptée, qui consistait à se décharger de ses responsabilités en cas de crise, s’est en fait retournée contre lui. Pendant la crise, plus que des sollicitations polies, ce que la population nippone semble au contraire rechercher c’est un leadership fort.

Où est l’opposition ?

S’agissant de l’autonomie des régions, le gouvernement Abe a donc eu trois approches : le déni, l’acceptation quoique à plusieurs vitesses et le moyen d’échapper à ses propres responsabilités. Il a également mis en avant diverses mesures de revitalisation locale qui, pourtant très ambitieuses, ont eu des résultats extrêmement hétérogènes. Toutefois, aucune de ces stratégies n’a cependant eu de conséquences négatives dans les urnes.

Depuis 2012, le parti d’Abe Shinzô a fait un sans-faute : trois victoires écrasantes aux élections des Chambres basses et hautes de la Diète, tout en retrouvant sa position dominante aux élections législatives. Bien que le nombre de voix ait diminué tout au long de cette période, le PLD est parvenu à remporter les élections grâce au manque de cohésion de l’opposition, de sa coalition avec le Kômeitô et à un fort taux d’abstention. Par ailleurs, l’opposition et ses éternelles querelles n’ont guère inspiré la confiance des électeurs.

En 2009, après la défaite du PLD, le Parti démocrate du Japon (PDJ) a remporté des sièges non seulement dans les campagnes mais également dans les villes, arrachant ainsi des fiefs électoraux appartenant de longue date au PLD. Pour les observateurs, le Japon entrait enfin dans un système à deux partis ; ces formations pouvaient rivaliser l’une avec l’autre dans tout l’Archipel. Cette vision sera rapidement remise en cause en 2012 suite à l’effondrement du PDJ et à l’incapacité de l’opposition à se regrouper et à présenter des candidats dans tout le pays. Dans l’intervalle, le PLD avait réussi à s’imposer dans un grand nombre de régions. Dans les préfectures, les partis qui ont succédé au PDJ sont devenus pour ainsi quasiment inexistants. Sans un réseau solide de figures politiques au niveau local, comme celui du PLD, les difficultés de l’opposition pour recruter des candidats efficaces capables de rassembler les électeurs dans les urnes lors des scrutins nationaux demeureront.

Deux figures politiques ont donné du fil à retordre au PLD pendant le gouvernement Abe : Hashimoto Tôru, gouverneur d’Osaka et Koike Yuriko, gouverneure de Tokyo. Si tous deux ont échoué au niveau national, ils ont d’abord pris un élan considérable et même obtenu la faveur des électeurs bien au-delà de leurs régions. Les révoltes électorales urbaines de ce type dans la politique locale japonaise ne datent pas d’hier. Reste à savoir si, quand et comment les électeurs dans les zones rurales se révolteront contre le PLD, au pouvoir depuis quasiment 1955, année de sa fondation.

À gauche : la gouverneure de Tokyo, Koike Yuriko, en 2020.  À droite : Hashimoto Tôru, en campagne pour les élections conjointes aux postes de maire et de gouverneur d’Osaka en novembre 2015 (Jiji Press)
À gauche : la gouverneure de Tokyo, Koike Yuriko, en 2020.  À droite : Hashimoto Tôru, en campagne pour les élections conjointes aux postes de maire et de gouverneur d’Osaka en novembre 2015 (Jiji Press)

Il faut pour l’opposition trouver comment persuader les électeurs des régions de ne pas voter par défaut pour le PLD. Comment est-il possible de remporter un scrutin à l’échelle nationale, notamment celui de la Chambre haute, avec le seul soutien des zones urbaines ? Sans une présence de poids au sein des gouvernements locaux, la stabilité tant de l’électorat que de la gouvernance restera fragile. Cependant, jusqu’à présent, l’opposition a été trop accablée par des conflits internes et par des financements insuffisants pour être en mesure de mettre en place un réseau au niveau local dans de nombreuses régions, fiefs électoraux du PLD.

Peut-être les prochains dirigeants du PLD auront-ils de nouvelles idées pour remédier à la désertification des zones rurales. D’autant plus que le PLD n’est pas exactement solide comme un roc : des femmes et des hommes politiques de deuxième et troisième génération, qui sont nés et qui ont fait leur scolarité à Tokyo, qui prennent la succession de leur père ou de leur mère et qui pourtant ne passent presque jamais de temps dans leur région natale ; des candidats impopulaires parachutés sans raison et sans attachement particulier dans les régions ; des désaccords au sein du parti sur la sélection des candidats au poste de gouverneur. Malgré tout cela, aucune d’alternative suffisamment forte pour les électeurs dans les régions n’a été présentée, permettant de fait au PLD de continuer à l’emporter par défaut.

Bien que la population vieillisse et diminue, ces places « non désirées » comptent toujours pour une part importante des sièges parlementaires. Ce sont ces mêmes places « non désirées » qui sont à l’origine de séismes politiques. C’est ce sentiment amer des campagnes et des banlieues envers les métropoles qui est l’une des raisons principales du triomphe de Donald Trump, du soutien au Brexit et de la montée de l’extrême droite ainsi que de la multiplication des manifestations antimondialisation en Europe. En politique, les fiefs électoraux qui sont le plus souvent pris pour acquis peuvent – et c’est souvent le cas – se rebeller.

(Photo de titre : Minami-Uonuma, dans la préfecture de Niigata, une zone rurale qui mérite d’être observée à l’aune de l’évolution de la scène politique nationale. Machâ/Pixta)

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